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Le couple et ses déliaisons violentes: dimensions sociales, subjectives et intersubjectives

O casal e suas rupturas violentas: dimensões sociais, subjetivas e intersubjetivas

The couple and its violent untied: social, subjective, and intersubjective dimensions

La pareja y sus violentas roturas: dimensiones social, subjetiva e intersubjetiva

Comment aujourd’hui articuler la réalité sociale du couple et sa réalité inconsciente afin de rendre compte de la violence conjugale contemporaine? Après un bref retour sur les fondements anthropologiques du couple et du lien d’alliance symbolique (mariage, Pacs) ou “libre” qui le fonde, nous évoquerons l’imaginaire de la conjugalité autrement dit le fantasme de réalisation idéale de soi et de ses affects au travers de la mise en couple pour en venir à poser les coordonnées conjugales et subjectives impliquées dans le passage à l’acte violent. Deux vignettes cliniques permettent de saisir comment opère dans le lien conjugal le passage de l’amour à l’hainamoration. Seront ainsi ouvertes les possibles déliaisons, sources de violence, entre les dimensions sociale, imaginaire, subjective et intersubjective de la conjugalité.

Mots-clés:
Violence conjugale; dimension sociale; intersubjective; hainamoration


Resumes

Como articular a realidade social do casal e a sua realidade inconsciente para dar conta da violência conjugal contemporânea? Depois de uma breve revisão dos fundamentos antropológicos do casal e do vínculo de aliança simbólica (casamento, PACS) ou “livre” que lhe está subjacente, discutiremos o imaginário da conjugalidade, ou seja, a fantasia da auto-realização ideal e os seus efeitos através da relação de casal, a fim de estabelecer as coordenadas conjugais e subjectivas envolvidas na passagem à violência. Duas vinhetas clínicas permitem-nos apreender como se opera a passagem do amor ao ódio no laço conjugal. Isto abrirá as possíveis deslocações, fontes de violência, entre as dimensões sociais, imaginárias, subjectivas e intersubjectivas da conjugalidade.

Palavras-chave:
Violência de casal; dimensão social; intersubjectiva; hainamoração

How can we articulate the social reality of the couple and its unconscious reality to account for contemporary conjugal violence? After a brief review of the anthropological foundations of the couple and the symbolic (marriage, civil solidarity pact – PACS) or “free” alliance link that underpins it, we will evoke the imaginary of conjugality. In other words, the fantasy of the ideal realization of oneself and one's affects via the couple relationship, in order to pose the conjugal and subjective coordinates involved in the passage to the violent act. Two clinical vignettes allow us to comprehend how the passage from love to hatred operates in the conjugal bond. Such understanding will open up possible dislocations, roots of violence, among social, imaginary, subjective and intersubjective dimensions of conjugality.

Keywords:
Domestic violence; social dimension; intersubjective; hainamoration


¿Como articular la realidad social de la pareja y su realidad inconsciente para dar cuenta de la violencia conyugal contemporânea? Tras un breve repaso de los fundamentos antropológicos de pareja y del vínculo simbólico (matrimonio, PACS) o de alianza “libre” que la sustenta, abordaremos el imaginario de la conyugalidad, es decir, la fantasia de la realización ideal de uno mismo y de sus afectos a través del hecho de estar en pareja, para establecer las coordenadas conyugales y subjetivas implicadas en el paso al acto violento. Dos vinetas clínicas permiten captar cómo opera el paso del amor al odio en el vínculo conyugal. Esto abrirâ las posibles dislocaciones, fuentes de violencia, entre las dimensiones social, imaginaria, subjetiva e intersubjetiva de la conyugalidad.

Palabras clave:
Violencia de pareja; dimension social; intersubjetiva; odioenamoración


Introduction

Si la violence apparaĩt être le témoignage de l’échec à faire lien dans une perspective sociale, si elle fait symptôme dans de nombreux couples contemporains, comment penser ce phénomène social dans la perspective psychanalytique? Nous avons fait le choix d’une articulation psychosociale, psychologique et psychanalytique dans le cadre d’une recherche dont l’objectif est de penser la persistance énigmatique de la violence de genre dans nos sociétés séculaires, occidentales et, en principe, modernes. Jusqu’alors deux facteurs ont été pointés comme causes du problème. D’une part, la réalité des normes sociales qui naturalisent les inégalités de genre et, par conséquent, fomentent l’exercice de cette inégalité sous différentes formes de pouvoir (économique, sexuel, affectif, intellectuel, juridique...). D’autre part, les réalités subjectives des auteurs de violence et des victimes (expériences traumatiques, transmissions familiales, réalités psychiques, troubles de la personnalité). La persistance de la violence de l’homme sur la femme en couple montre que les champs conceptuels et les pratiques qu’ils soutiennent dans le combat de ce problème, sont insuffisants. Bien qu’il y ait des indications qu’il existe des articulations entre les deux dimensions que sont le social et le subjectif, les modalités de ces articulations restent ouvertes. La réflexion qui suit est une contribution à cette question plus large et adoptera la focale du basculement de la relation de couple dans la violence du fait de la déliaison des dimensions constitutives de la conjugalité.

Une définition devenue courante de la violence en couple nous inviterait à la penser comme ce processus au cours duquel un partenaire utilise la force ou la contrainte pour perpétuer et/ou promouvoir des relations hiérarchisées et de domination. Il pourrait se produire durant la relation ou après la fin de la relation indépendamment de sa temporalité. Il se caractérisait par “sa persistance, son impact destructeur, son effet de peur, son intention cachée de controle et de pouvoir sur l’autre” selon Amnesty International. La distinction d’avec le simple conflit de couple, même si ce dernier peut donner lieu à un débordement agressif, est donc patente. Dans un cas le rapport n’est plus égalitaire, dans l’autre cas il le demeure. Dans la perspective psychanalytique, cette premiere definition de la violence au sein du couple (comme resultante d’un processus de domination) paraĩt réductrice (Gaspard, 2015Gaspard, J.-L. (2015). Quêtes identitaires dans notre modernité. Revista Subjetividades, Biopolítica e subjetividades contemporâneas, 15(3), 333-340.; Dupim & Gaspard, 2017Dupim, G., & Gaspard, J.-L. (2017). As dores crônicas e a devastaçao feminina. In V. Besset, & S. Zanotti (Orgs.), A face crônica da dor (pp. 193-231). EDUFAL.; Trichet, Hamon & Gaspard, 2015Trichet, Y., Hamon, R., & Gaspard, J-L. (2015). Traitement psychanalytique et sub-jectivation de l’acte d’homicide chez des sujets psychotiques. Bulletin de psychologies 538, t.68 (4), 331-339 (PsycINFO).). Et, il nous revient d’introduire dans le scénario de violence pouvant aboutir à des faits extrêmement graves comme le féminicide (Grihom, 2019Grihom, M.-J. (2019). Crime de genre et fantasme féminicide. À propos du fantasme “On tue une femme”. In L. Bodiou, F. Chauvaud, L. Gaussot, M.-J. Grihom, L. Laufer L., & B. Santos (Dir.), On tue une femme. Le féminicide. Histoire et actualités (pp. 407-427). Hermann.) une plus grande complexité (Gaspard, 2015Gaspard, J.-L. (2015). Quêtes identitaires dans notre modernité. Revista Subjetividades, Biopolítica e subjetividades contemporâneas, 15(3), 333-340.). Aussi, chercherons-nous à articuler les dimensions sociales, subjectives et intersubjectives en jeu en ayant pour hypothèse que les déliaisons violentes dans le couple seraient à la fois inhérentes au montage de ses parts réelles, symboliques et imaginaires, aux vulnérabilités des sujets en présence enfin aux paroles circulant dans l’intersubjectivité qui viennent déclencher certains passages à l’acte.

Avançons quelques remarques. La notion d’intersubjectivité n’est pas sans poser des difficultés théoriques. Lacan en effet se déprendra de son usage au long de son enseignement notamment à partir de la primauté donnée au champ symbolique en allant dans son séminaire Livre XVIII (1970-71/2007): “D’un discours qui ne serait pas du semblant” proposer la notion d’intersignifiance (Leçon du 13 janvier, p. 10). Le fait que le sujet ne peut être que représenté (par un signifiant pour un autre signifiant) et que la subjectivité ne puisse équivaloir à la définition du sujet est chez Lacan d’importance. Sans ignorer cette disjonction entre subjectivité et sujet, la référence à l’intersubjectif dans notre propos tient à deux raisons. D’une part, le devenir de cette notion dans le champ psychanalytique, en particulier les emprunts faits à la première conception de Lacan par les psychanalystes familiaux centrés sur le fonctionnement groupal et ses logiques inconscientes (René Kaĕs par exemple). D’autre part à la réalité humaine à laquelle nous nous intéressons. Il nous semble incontournable d’aborder dans le cadre de nos recherches sur la violence au sein d’un couple ce qui relèvent entre partenaires d’enjeux relationnels, affectifs mais aussi inconscients et intersignifiants comme d’éventuels conflits de subjectivité. Et nous considérons la subjectivité comme la manière d’etre (de chaque sujet) qui peut varier selon les discours dans lesquels sont pris les sujets, ici pour notre recherche au sein du couple.

En résumé, nous partirons de ce que serait la norme conjugale contemporaine et son discours et insisterons sur sa dimension imaginaire pour la mettre en tension avec la conjugalité dans sa dimension symbolique avant de chercher à saisir ce qui vient disjoindre, délier chez un sujet singulier, dans le temps de l’acte violent, le nouage de ces deux dimensions articulées à la troisième qu’est le réel de la jouissance. Les notions d’hainamoration, de ravage et de couple en tant que symptôme permettront au travers de deux vignettes cliniques de rendre compte de ces moments de déliaisons violentes du couple pouvant conduire au pire.

Le couple, une réalité sociale

Vouloir traiter de la réalité du couple et donc de la conjugalité aujourd’hui en relation avec la violence qui peut s’exprimer dans le couple, préférentiellement sur la femme mais pas exclusivement, nous confronte à une somme d’interrogations plutôt que de réponses dès lors que l’on envisage sa dimension première, autrement dit sociale ou anthropologique. “Cette constatation d’un lien originel stable entre hommes et femmes (...) est relativement récente. Ce n’était pas la conclusion d’anthropologues de la fin du XIXe siècle. Les pères fondateurs de la discipline croyaient en un communisme sexuel primitif” (Todd, 2022, p. 15Todd, E. (2022). Où en sont-elles? Une esquisse de l’histoire des femmes. Seuil. ISBN-10↰:↱2021406474). Or tout laisse à penser que pour des raisons de survie du groupe ou du clan, la famille nucléaire, un père la mère avec les enfants semble avoir été l’unité de base des cultures de chasseurs-cueilleurs en droite ligne d’Homo sapiens originel. La polygynie y occupe une part relative 15% et vraisemblablement la polyandrie également. Todd inscrit la parenté et la conjugalité du monde occidental dans la diffusion du modèle de cette famille originelle, modèle simple selon lui avec une coopération entre les genres.

De leur côté, les sources démographiques (INSEE) et sociodémo-graphiques dégagent de grandes tendances quant aux formes de la conjugalité en France (abaissement du lien institué qu’est le mariage, accroissement des contrats PACS et augmentation des unions dites libres) à quoi s’ajoutent la prise en compte de l’homogamie par rapport à l’hétérogamie et la plus grande variabilité des modalités de résidence (domesticité partagée ou non, pluridomicile, habitat séparé) eu égard aux premieres études de l’INED en 1959.

Un autre facteur de changement historique concerne la formation des couples et leurs parcours, “la transformation des conditions d’entrée dans la conjugalité” (Attané et al., 2018Attané, I., Bergstrom, M., Ouadah-Bedidi, Z., & Thibeaud, M. (2018). En marge du couple. Genre et normes conjugales. INED, document de travail 243. https://www.ined.fr/fr/recherche/projets-recherche/A0311#tabs-2
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), en lien avec l’allongement des études et la précarité de l’emploi créent un écart temporel conséquent entre la première relation sexuelle et la première cohabitation en couple ce qui favorise selon ces auteurs l’experimentation de la vie en couple à travers des étapes devenues réversibles. Ainsi, la possibilite de changement se trouve, dès le depart, incluse dans l’union même ou l’alliance de deux sujets: s’unir contient la possibilité de la rupture et de la séparation.

Enfin, le mouvement d’émancipation des femmes et les conditions sociales dans lesquelles elles sont diversement prises, ont sous la poussée du monde néolibéral, créé de nouvelles attentes, revendications mais aussi contraintes qui ont, pour une part, concouru à fragiliser le lien institué qu’est l’alliance et ses formes contemporaines. L’époque du “démariage” selon I. Théry (1993)Théry, I. (1993). Le Démariage: Justice et vie privée. Odile Jacob. Hors collection. ISBN: 9782738102096. n’a pas eu, d’ailleurs, pour effets qu’une libération mais aussi une aggravation des conditions de vie pour les femmes en foyer monoparental.

En parallèle de ce mouvement de transformation de la conjugalité, l’observation par certains chercheurs de la mesure de l’égalité selon le genre laisse apparaĩtre des éléments assez contrastés en ce qui concerne les représentations et les injonctions associées à la conjugalité. Ainsi, pour certains

la conjugalité — et plus précisément la conjugalité hétérosexuelle — constitue une condition pour être considéré comme un “vrai homme” ou une “vraie femme”. Tandis que pour d’autres à l’inverse, le fait de ne pas être en couple permet de s’extraire partiellement des rôles assignés à chaque sexe — notamment en faisant fi de la division sexuelle du travail (et la répartition des rôles) qui caractérise les couples — et non seulement les couples hétérosexuels. (Bergstrŏm, 2018, p. 7Bergstrom, M. (2018). Introduction. In M. Bergstrom et al., En marge du couple. Genre et normes conjugales. INED, Documents de travail, n. 243. https://www.ined.fr/fr/recherche/projets-recherche/A0311#tabs-2
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)

Cette crise ou mutation de la conjugalité par rapport à la norme antérieure de la formation du couple, des fiançailles et de l’alliance ne dénue pas toutefois de valeur le modèle du couple uni qui convole par amour dans le mariage et s’engage “pour le meilleur et pour le pire”. Bien au contraire un “imaginaire social de la conjugalité” (Neyrand, 2018Neyrand, G. (2018). Norme conjugale et conjugalités plurielles.In G. Neyrand, L’amour individualiste (pp. 129-184). Érès. https://doi.org/10.3917/eres.neyra.2018.01.0129
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) aiguille fortement la quête du partenaire idéal et les célibataires ou marginaux par rapport à la mise en couple, s’ils peuvent déclarer d’autres aspirations eu égard à leur genre respectif, n’en sont pas moins concernés par la force de la norme conjugale (Attané et al., 2018Attané, I., Bergstrom, M., Ouadah-Bedidi, Z., & Thibeaud, M. (2018). En marge du couple. Genre et normes conjugales. INED, document de travail 243. https://www.ined.fr/fr/recherche/projets-recherche/A0311#tabs-2
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).

Les évolutions récentes comme l’instabilité des couples, la diversité des formes d’union ou l’augmentation du nombre de personnes qui vivent seules ne traduisent pas forcément un affaiblissement de la norme conjugale. On pourrait même dire le contraire. L’aspiration à la vie à deux — et les injonctions à s’y conformer sont peut-être plus fortes que jamais. (Vivier & Courtel, 2018, p. 26Vivier, G., & Courtel, V. (2018). Alors, tu nous le presentes quand?. Vivre célibataire, entre norme conjugale et experience personnelle. In I. Attané, M. Bergstrŏm, & Z. Ouadad-Bedidi, En marge du couple. Genre et normes conjugales. INED, Documents de travail, n. 243. https://www.ined.fr/fr/recherche/projets-recherche/A0311#tabs-2
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)

La norme conjugale resterait toujours aussi forte et monolithique selon Neyrand (2018)Neyrand, G. (2018). Norme conjugale et conjugalités plurielles.In G. Neyrand, L’amour individualiste (pp. 129-184). Érès. https://doi.org/10.3917/eres.neyra.2018.01.0129
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:

(...) il faut bénéficier d’une relation de couple gratifiante qui, seule, permettra de s’épanouir; cet énoncé performatif de ce qui est supposé être le couple et ses pouvoirs s’appuie aujourd’hui, plus que jamais, sur ce qui est présenté désormais comme la condition de la mise en couple et du maintien de celle-ci : le sentiment amoureux entre les deux partenaires. (p. 129)

Ce que ce sociologue qualifie “d’injonction conjugale à l’amour” n’a rien d’une norme explicite (on n’est pas tenu de s’aimer pour s’unir), il s’agit bien d’une norme implicite inscrite dans la structure de l’imaginaire social contemporain. Cette référence qu’est l’amour est d’autant plus essentielle que les facteurs sociaux, familiaux, patrimoniaux et filiatifs justifiant le modèle socio-économique traditionnel du mariage auraient perdu en importance. Toutefois Neyrand (2002)Neyrand, G. (2002). Idéalisation du conjugal et fragilisation du couple, ou le paradoxe de l’individualisme relationnel. Dialogue, 155, pp. 80-88. https://doi-org.ressources.univ-poitiers.fr/10.3917/dia.155.0080
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souligne un certain nombre de paradoxes du couple moderne: concilier conjugalité et autonomie en particulier tout en s’assurant d’une illusoire complétude.

Bien au-delà d’une satisfaction mutuelle des désirs sexuels, l’autre du couple voit s’affirmer ce qui le pose en sujet d’un couple et non d’une simple relation amoureuse ou érotique: sa capacité à incarner la base sécurisante de l’affirmation personnelle de l’individualité d’autrui, dans un mouvement oů lui-même enjoint à l’autre d’endosser la même fonction identitaire primordiale. Ce qui se survalorise alors, en parallèle à l’effondrement des autres dimensions — plus sociales — de la conjugalité, est la création d’un espace relationnel commun de réassurance narcissique mutuelle, fortement régressif. (p. 86)

La prévalence des liens affinitaires sur les liens institués constatée dans les années quatre-vingt-dix (De Singly, 2010De Singly, F. (2010). Sociologie de la famille contemporaine. A. Colin (4e éd.). ISBN 9782200260705, 2200260709) et contemporaine du démariage (Théry, 1993Théry, I. (1993). Le Démariage: Justice et vie privée. Odile Jacob. Hors collection. ISBN: 9782738102096.) semble bien s’inscrire dans la manière dont l’individualisme a émergé comme une valeur du libéralisme avec le lot de changements dans les relations entre les genres que cela a généré (Neyrand, 2018Neyrand, G. (2018). Norme conjugale et conjugalités plurielles.In G. Neyrand, L’amour individualiste (pp. 129-184). Érès. https://doi.org/10.3917/eres.neyra.2018.01.0129
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). Est-ce à dire que dans le couple moderne le fait d’aimer serait essentiellement pourvoyeur d’une valence narcissique, celle de réalisation de soi ou s’agit-il aussi, par cette recentration sur la sphère privée d’une quête d’identité sociale, à en croire les injonctions à faire couple que reçoivent les célibataires et la dévalorisation des représentations inhérentes au célibat dans les études citées précédemment? Notons au passage que l’identité est toujours sociale (attribuée ou symbolique) même si elle se décline en sentiment identitaire, lui psychologique. Il semblerait que subsistent aussi, en dépit du primat accordé à l’amour, des modalités relationnelles différenciées dans les couples: asymétriques selon le genre ou égalitaristes — susceptibles donc d’orienter tant les enjeux identitaires genrés que les représentations du conjungo.1 1 Vient de conjugare, terme emprunté aux grammairiens latins “unir, marier” de jugum “joug”.

Quoi qu’il en soit, dans la perspective psychanalytique, il semble délicat d’affirmer que le lien conjugal se réduit aujourd’hui à sa seule valence imaginaire et qu’il n’a plus de valence symbolique à constater les mouvements de défense et de resistance suscités par le “mariage pour tous” par exemple. Par ailleurs, de la désunion ne résulte pas nécessairement la rupture de tout lien avec l’ex-partenaire dès lors qu’un ou des enfants sont nés du couple. Le couple parental possède une existence juridique même si le couple conjugal a disparu. Ainsi, dans le contexte sociétal d’une relation devenue le lieu central de reconnaissance narcissique de chacun, oŭ la dimension sociale et identitaire du conjungo se serait atténuée, comment faire avec la rupture de la relation imaginaire sexuée qui lie le couple? Quels effets de violence la norme impérative du “faire couple par/pour l’amour” peut-elle alors induire?

De l’amour à la haine

Le passage à I’acte violent et ses coordonnées

Tout l’enjeu afin de penser la violence du couple serait de réussir à situer celle-ci dans la perspective des déliaisons entre les dimensions symboliques, imaginaires, fantasmatiques et réelles qui fondent le couple. La violence quant à elle, peut être pensée à la fois comme un fait de discours (culturel, socio-économique, juridique) mais elle doit être aussi envisagée dans son rapport avec des expériences subjectives et intersubjectives à tout coup singulières qui peuvent notamment renvoyer aux scénarios infantiles, à valeur potentiellement traumatiques ou à des traumatismes réels (maltraitance, abus sexuels que l’on retrouve régulièrement chez les femmes victimes de violence conjugale comme chez les auteurs). Dans la majorité des cas, la situation de déclenchement conduisant à la violence peut ainsi être appréhendée:

Si l’un des partenaires n’arrive plus ou s’estime potentiellement évincé du lien affectif sur lequel est fondé le couple. Nous trouvons là l’ensemble des problématiques oŭ l’acmé de l’angoisse de séparation ou d’abandon mène à des actes soudains ou prémédités selon De Neuter (2013)De Neuter, P. (2013). Violences masculines et angoisses d’abandon. Cliniques méditerranéennes, 88, 113-122). https://doi.org/10.3917/cm.088.0113
https://doi.org/10.3917/cm.088.0113...
.

Si la singularité d’un des partenaires est déniée, mise en défaut ou potentiellement annulée, l’apparition d’un moment critique de désubjectivation est une occurrence fréquente dans les passages à l’acte meurtriers.

Ainsi, les actes violents surgiraient quand l’un des protagonistes se trouve face à l’émergence d’un réel (impossible à dire, impossible à supporter) soit du fait d’une atteinte narcissique radicale (problématique imaginaire ou identitaire) soit en référence à la dimension fantasmatique (traversée brutale de ce dernier, ravalement, ravage). Nous aurons à l’esprit que,

(...) contrairement au sens commun, l’homme est l’esclave du semblant qu’il supports, tandis que, plus libre à cet endroit, la femme est aussi plus proche du réel; que rencontrer sexuellement la femme est toujours pour l’homme mettre le semblant à l’épreuve du réel, et vaut comme “heure de vérité”; que, si le phallus est apte à signifier l’homme comme tel, “out hommé”, la jouissance féminine, pour n’etre “pas-toute” prise dans ce semblant, fait objection à l’universel. (Miller, 2017Miller, J.-A. (2017). Présentation du Livre XVIII, D’un discours qui ne serait pas du semblant (Séminaire XVIII de Lacan, 1970-1971), Seuil., resumé)

Deux courtes vignettes cliniques permettront d’illustrer notre propos — avec cette precision importante qu’il ne s’agit pas ici de soutenir les versions données par les agresseurs et meurtriers mais de tirer enseignement et d’attraper quelques coordonnées subjectives de la situation de violence ayant conduit à l’extrême d’un féminicide (Grihom, 2019Grihom, M.-J. (2019). Crime de genre et fantasme féminicide. À propos du fantasme “On tue une femme”. In L. Bodiou, F. Chauvaud, L. Gaussot, M.-J. Grihom, L. Laufer L., & B. Santos (Dir.), On tue une femme. Le féminicide. Histoire et actualités (pp. 407-427). Hermann.; Gaspard, 2015Gaspard, J.-L. (2015). Quêtes identitaires dans notre modernité. Revista Subjetividades, Biopolítica e subjetividades contemporâneas, 15(3), 333-340.).

Tout d’abord, revenons de cette tragique histoire qui avait fait en France l’actualité où une jeune joggeuse prénommée Alexia2 2 On pourra consulter à ce propos les grands journaux français, notamment Le Monde, Procès Daval: après trois ans de frénésie, le verdict d’une justice sereine. était portée disparue puis retrouvée morte à moitié carbonisée dans un sous-bois. Très rapidement son mari Jonathan Daval, en larmes devant les caméras, lance un vibrant appel à la population pour faire une marche blanche en compagnie de ses beaux-parents. S’ensuit toute une série de prises de parole dans les médias jusqu’à ce jour oŭ cet homme est arrêté, va passer aux aveux et reconnaĩtre que dans un excès brutal de colère il a étranglé sa femme de ses propres mains. Revenons au contexte qui permet de dessiner les contours de ce passage à l’acte. Il y a tout d’abord une relation de couple bâtie sur la problématique de domination (même si c’est ici Alexia qui est décrite comme beaucoup plus dominante et autoritaire que son mari). Parallèlement, il faut avoir à l’esprit un contexte fort éprouvant pour le couple. Depuis plusieurs mois, celui-ci essaie d’avoir un enfant et après une fausse couche Alexia se montre très vindicative à l’égard de son mari accusé de ne pas être à la hauteur de sa virilité. Certains SMS d’Alexia produits par la défense de Jonathan Daval sont des plus explicites: “T’es impuissant, tu bandes pas, t’es une merde”. Celle-ci à de nombreuses reprises le provoque aussi en utilisant des sextoys. Ce qui conduit Jonathan, selon ses dires, à retarder le plus possible ses retours à la maison en fin de journée. Selon la version du mari, c’est en revenant d’un dĩner chez les parents d’Alexia, qu’une dispute aurait éclaté et dégénéré. Alexia aurait demandé à son mari d’avoir un rapport sexuel et, face à son refus, se serait mise violemment en colère. Jonathan aurait alors (toujours selon ses dires) tenté de maĩtriser son épouse. Et l’humiliation répétée aurait abouti ce soir-là à un passage à l’acte meurtrier.

Troisième élément: L’auteur de ce féminicide est présenté par les experts comme étant une personnalité immature, marquée par une mauvaise image de lui-même. Au sein de son couple, il aurait été confronté à “l’impossibilité de devenir un homme en devenant lui-même père” en raison de ses problèmes sexuels d’ordre purement psychologique. L’un des derniers experts mandatés diagnostique chez l’accusé un “faux self, avec deux personnalités qui coexistent sans jamais se croiser. Comme si Jonathan Daval ne cherchait qu’à susciter des “sentiments positifs” envers lui de la part de ses proches. Cette “personnalité caméléon” et manipulatrice qui essaie de donner la meilleure image possible auprès des autres, vit aussi de manière clivée et pour une large part cachée (même de sa compagne) un rapport très fort à sa propre mère (alors qu’il affirme à sa belle-famille le contraire et se présente comme un malheureux enfant en appel d’adoption).

Dernier élément: ce double jeu qui lui permet d’avoir les bonnes graces de la mère d’Alexia qui le prend sous son aile comme un fils attise dans le miroir une rivalité pour le moins compliquée à vivre pour leur fille Alexia. Tous ces éléments concourent à démontrer l’équilibre précaire au sein du couple avec le risque — du fait d’une sexualité pour le moins troublée — d’une prochaine séparation.

Partons maintenant d’une brève vignette clinique issue de la pratique d’un des auteurs de ce texte. C’est un homme de plus de soixante ans reçu à sa demande au cabinet en complémentarité d’un suivi judiciaire mensuel. Monsieur vient de sortir de prison oů il a purgé pour homicide (féminicide) une peine de 19 ans (peine réduite pour bonne conduite à une dizaine d’années). A l’époque précédant les faits, Monsieur assumait la direction d’une société avant de se faire licencier du fait d’une restructuration d’entreprise. Divorcé d’une première épouse (avec laquelle il avait eu 3 enfants), il entretenait une relation suivie avec une femme qu’il nomme “sa seconde compagne»» sans pour autant partager avec elle le même logement. Cependant selon ses dires, la relation s’est avérée au fil du temps toxique. Les relations dans le couple font du yo-yo. Il la soupçonne de le tromper et veut la quitter ce qu’elle refuse. Se sentant mal dans sa peau du fait de son chômage et de la difficulté de retrouver à son âge un nouvel emploi, Monsieur se met à boire. Et un soir, alors qu’elle ne cesse de le dévaloriser et se fait “persifleuse”, elle s’en serait prise à lui et n’aurait eu de cesse de le rabaisser. Pris d’une colère noire, il se saisit du premier objet qu’il trouve et pour la faire taire, d’un coup de planche à pain, lui assène un coup sur le crâne et la tue. Comme vous pouvez le constater, chez cet homme, est mise en jeu la réversion de l’amour en une haine rageuse et absolue.

De l’hainamoration au ravage

Dans le séminaire XX intitulé Encore (Lacan, 1972-73/2017), après avoir parlé de l’amour et de la haine, Lacan introduit un néologisme en référence avec la notion d’énamoration, ce phénomène amoureux voire passionnel que l’on trouve dans le transfert. Ce nouveau terme de “l’hainamoration” n’est pas simplement compris comme étant la face sombre ou opposée de l’Amour mais permet à Lacan de souligner que la haine — en tant qu’elle vise l’être — peut tuer ou conduire au meurtre. Ce que nous retrouvons dans les deux exemples proposés au travers de témoignages — qui sont certes sujet à caution puisqu’il s’agit de paroles de meurtrier — nous semble relever d’un effet du ravage. Quand d’une colère sourde, d’un ressentiment par rapport à un amour passionné ou exclusif, une haine féroce peut naĩtre.

Pour la petite histoire, cette expression de ravage est généralement utilisée de manière plus restrictive dans notre champ. Mis à l’honneur en 1973 dans l’Étourdit (2001) par Jacques Lacan, le ravage est utilisé pour désigner la nature potentiellement destructrice du lien qui peut unir une mère à sa fille:

À ce titre l’élucubration freudienne du complexe d’Œdipe, qui y fait la femme poisson dans l’eau, de ce que la castration soit chez elle de départ (Freud dixit), contraste douloureusement avec le fait du ravage qu’est chez la femme, pour la plupart, le rapport à sa mère, d’oů elle semble bien attendre comme femme plus de subsistance que de son père. (p. 465)

Ce terme de ravage est une référence clinique très intéressante pour désigner un point de butée, un réel irréductible. Dans le cas du ravage maternel, il vient faire écho à l’énigme du féminin rencontrée par Freud dans ses derniers textes. Pour Lacan c’est une façon d’opposer la sexuation féminine, c’est-à-dire de la femme pas-toute soumise à l’emprise du signifiant phallique à la logique freudienne de la castration oů les femmes ne seraient confrontées qu’à la seule revendication phallique du penisneid. Le ravage entre la mère et la fille révèle ainsi l’impossible harmonie d’un amour qui bute sur l’impossible de la sexualité et de l’accession à la féminité. Le ravage s’exprime par une somme de malentendus qui surgissent dans les tentatives de donner et recevoir des preuves d’amour. On repère l’effet ravageant sur la fille de ce lien primitif à la mère non pas tant les confrontations qui peuvent survenir dans la réalité mais dans l’impossibilité pour la fille d’assumer une position féminine en raison de la persistance de ce lien premier et de cet attachement ambivalent et passionnel.

De manière plus générique, si l’on s’en tient aux rapports entre deux partenaires au sein d’un couple, tout ce qui peut s’inscrire du côté d’une voie sans issue et de l’impossible, tout ce qui peut convoquer un réel peut avoir des effets dévastateurs. On mesure dès lors ce qu’il peut en coűter lorsque le sujet se trouve confronté à rencontrer la menace de ce qui relève d’une annulation pure et simple. C’est en ce point de dévoilement d’un au-delà du trou que peut se produire l’ébranlement du fantasme (ou de son tenant lieu), voire dans une fulgurance ce que l’on note parfois la traversée sauvage du fantasme. Et l’on comprend ainsi comment l’impact de l’injure peut faire événement et emprunter une voie (d’une) dramatique pour échapper dans les deux vignettes cliniques à une assignation définitive du type: “Tu n’es que cela, tu n’es qu’une M...”. L’injure prend la place de ce qui est avant que le sujet ne soit: le plongeant dans les affres du “moins que rien”.

Faire symptôme ensemble

Nous posions la question de savoir comment penser l’articulation des dimensions de la conjugalité: réalité sociale, subjective et intersubjective. Au sens d’un montage, le “faire couple” contient des dimensions différenciatrices et indifférenciatrices qui permettent de faire avec le réel du sexe, de la pulsion, avec le ravage. Autrement dit, le couple, qu’il soit conjugal, parental ou fraternel, est un modèle anthropologique originaire mais aussi imaginaire. Grâce à l’image de l’autre élu aimé on s’aime avec l’inévitable exaltation du sentiment passionnel, amoureux et agressif propre à cette relation imaginaire (rivalité, jalousies et passions). La dimension symbolique du conjugo tient quant à elle à la parole à valeur d’engagement et de promesse (le mariage, le choix de faire couple) qui fait entrer chacune et chacun dans le vocabulaire de son partenaire: “je suis ta femme, tu es mon homme”. Le “je suis...” avec le “tu es...” respectif ont beau se décliner de diverses manières dans les couples, selon la nature légale ou libre du lien, cela ne change en rien le fait qu’ils supportent les statuts identitaires, sociaux et familiaux de deux êtres qui s’assortissent, s’apparentent et tendent à s’appartenir d’abord au travers de la nomination d’une identité et d’une place dans le lien et plus largement dans les familles ainsi reliées. Le réel, celui de la jouissance s’en trouve ainsi encadré. Chaque montage conjugal forme une institution — ne serait-ce qu’à deux — et partant de là constitue “un foyer symptomatique dont nous pouvons vérifier l’intensité dans notre expérience analytique. Se marier, c’est en somme consentir à faire symptôme ensemble, au point d’en créer un, inédit et original” (Assoun, 2018, p. 37Assoun, P.-L. (2018). L’enigme conjugale. Psychanalyse du mariage. PUF.ISBN 9782130812906).

Si la violence est par conséquence inhérente au couple institution car dépendante des normes et discours qui le structurent, elle révèle aussi l’envers du décor, l’inconscient à nu lors du déchamement pulsionnel. Qu’elle se fasse connaĩtre sous la forme d’une déliaison brutale du faire de l’Un, comme dans les vignettes cliniques précédentes, ou encore sous la forme chronique d’un “faire couple” conçu dans la haine de soi et de l’autre, elle dévoile l’envers du décor, l’autre scene, celle des visées narcissiques, des frustrations accumulées, de la parole entravée pour l’un ou l’autre dans le couple. Chaque nouveau couple sait pertinemment que ça rate l’union et pourtant chaque nouveau couple à l’aube de son parcours croit que lui — à la différence des couples parentaux — il va y parvenir, il va réussir à faire de l’Un qui dure. Les variations violentes ne s’apparentent sans doute pas toutes au passage à l’acte tel que nous l’avons décrit précédemment mais toutes peuvent s’envisager sous l’angle du leurre imaginaire de soi-même et de l’autre et du jeu de dupes (Assoun, 2018Assoun, P.-L. (2018). L’enigme conjugale. Psychanalyse du mariage. PUF.ISBN 9782130812906) dans lequel l’un ou l’autre est toujours pris, paré des habits de moitié conjugale pour mieux voiler les renoncements érotiques et autres auxquels il a consenti afin de réaliser cet idéal épanouissement narcissique via le truchement de l’autre.

Conclusion

Nous sommes partis de l’idée que la couple est d’abord une réalité sociale et à ce titre encadré par des normes tant symboliques qu’imaginaires produites par la culture. La subjectivation des sujets est fonction de celles qui viennent fixer les rôles et statuts genrés et garantir d’une reconnaissance sociale. La vitalité de la norme conjugale contemporaine nous a donné à penser que l’imaginaire social du “faire Un” participe de l’accroissement des violences faites aux femmes en couple en ce XXIe siècle. Sans doute que cette norme sociale rencontre et repose sur ce qui pousse dans la phase passionnelle du conjugo à l’annulation des différences entre les êtres en jeu. La perspective psychanalytique permet d’envisager qu’hormis l’angoisse de désamour et d’abandon et donc de perte de l’Un conjugal, le surgissement d’une violence léthale rencontre des effets de renversement de l’amour en haine et de ravage bien antérieurs à l’acte lui-même. Les deux vignettes présentées mettent en évidence — derrière l’impossible séparation du “Un” imaginaire, les enjeux mortels de la relation imaginaire d’une part, inconsciente d’autre part. Si les aspects de rivalité entre petits autres dominent dans le cas de Jonathan Daval, le risque de désubjectivation est bien présent chez ces deux hommes placés devant un point de réel: l’insupportable ravalement de l’être.

Ces analyses nous invitent à approfondir ce qu’il en serait de l’articulation des dimensions sociales, subjectives et intersubjectives en jeu dans la violence en couple au sens oů nous en avons précisé l’acception. Notre hypothèse que les déliaisons conjugales violentes tiennent pour une part au montage propre au couple de ses parts réelles, symboliques et imaginaires, pour une autre part aux vulnérabilités individuelles des partenaires en présence enfin aux paroles et à l’intersignifiance qui viennent déclencher certains passages à l’acte mérite d’etre utilisée pour tenter de rendre compte de la persistance de la violence conjugale.

  • 1
    Vient de conjugare, terme emprunté aux grammairiens latins “unir, marier” de jugum “joug”.
  • 2
    On pourra consulter à ce propos les grands journaux français, notamment Le Monde, Procès Daval: après trois ans de frénésie, le verdict d’une justice sereine.

Referências

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Source internet:

Publication Dates

  • Publication in this collection
    10 May 2024
  • Date of issue
    2024

History

  • Received
    18 May 2023
  • Reviewed
    01 Nov 2023
  • Accepted
    10 Dec 2023
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