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Université de São Paulo: Épicentre d’une controverse transnationale

Résumé

L’objectif est d’analyser la controverse entre deux professeurs qui occupaient les chaires de sociologie I et II à la Faculté de philosophie, sciences et lettres de l’Université de São Paulo dans les premières années de sa fondation. Cette controverse, qui opposait sociologie et ethnologie, philosophie sociale et recherche empirique, était ancrée dans deux milieux intellectuels distincts : la sociologie, à l’Institut d’éducation de l’université de São Paulo, et l’ethnologie, au Département de la culture de la municipalité de São Paulo. Il s’agit de montrer que les transferts intellectuels dépendent des affinités électives établies entre des groupes d’intellectuels étrangers et brésiliens et que, dans le cas de São Paulo, les intellectuels relativement plus proches des groupes dirigeants s’orientent vers la nouvelle discipline, l’ethnologie, tandis que ceux relativement plus dominés dans le champ du pouvoir préfèrent la sociologie, déjà enseignée dans les écoles normales. Dans cette étude, j’ai recours à l’analyse documentaire et textuelle, ainsi qu’à l’étude des trajectoires et des réseaux d’interdépendance.

Mots-clés
Missions Françaises; Université de São Paulo; Chaires de Sociologie; Institut de l’Éducation; Département de la Culture

Resumo

Trata-se de analisar a controvérsia entre dois professores que ocuparam as cadeiras de sociologia I e II na Faculdade de Filosofia, Ciências e Letras da Universidade de São Paulo em seus primeiros anos de funcionamento. Essa controvérsia, que opôs sociologia e etnologia, teoria social e pesquisa empírica, enraizou-se em meios intelectuais distintos: a sociologia, no Instituto de Educação da Universidade de São Paulo, e a etnologia, no Departamento de Cultura do Município de São Paulo. Assim, pretende-se mostrar que as transferências intelectuais dependem das afinidades eletivas estabelecidas entre grupos de intelectuais estrangeiros e brasileiros e que, no caso paulista, os intelectuais relativamente mais próximos aos grupos dirigentes se inclinam para a nova disciplina, etnologia, enquanto os relativamente mais dominados no campo do poder preferem a sociologia, já ensinada nas escolas normais. Para isso, utilizo análises documentais e textuais, bem como estudo de trajetórias e de redes de interdependência.

Palavras-chave
Missões francesas; Universidade de São Paulo; Cadeiras de sociologia; Instituto de Educação; Departamento de Cultura

Abstract

The aim is to analyze the controversy between two professors who occupied the chairs of sociology I and II at the Faculty of Philosophy, Sciences and Letters of the University of São Paulo in its early years. This controversy, which opposed sociology and ethnology, social theory and empirical research, was rooted in different intellectual circles: sociology, at the Institute of Education of the University of São Paulo, and ethnology, at the Department of Culture of the Municipality of São Paulo. The aim is to show that intellectual transfers depend on the elective affinities established between groups of foreign and Brazilian intellectuals and that, in the case of São Paulo, the intellectuals relatively closer to the ruling groups lean towards the new discipline, ethnology, while those relatively more dominated in the field of power prefer sociology, already taught in normal schools. To do this, I use documentary and textual analysis, as well as a study of trajectories and networks of interdependence.

Keywords
French missions; University of São Paulo; Chairs of sociology; Institut of Education; Department of Culture

La fondation de l’Université de São Paulo est intrinsèquement liée aux missions françaises et aux premiers professeurs étrangers de la Faculté de Philosophie, Lettres et Sciences Humaines1 1 . Cette recherche a été réalisée avec le soutien de la Fapesp – Fundação de Amparo à Pesquisa do Estado de São Paulo – et du programme DEA de la Fondation Maison des Sciences de l’Homme. Je remercie Hélène Arbousse-Bastide pour la mise à disposition des archives familiales. Je remercie Rafael Andrade et Bruno Cuer pour leur dialogue et leur collaboration dans la préparation de cet article, ainsi que Nadège Mézié pour la révision. . Ils ont laissé leur empreinte à travers des cours, des conférences et des publications, mais aussi à travers des réseaux de sociabilité et des projets institutionnels et intellectuels. Il s’agit d’identifier, dans cet article, les transformations de l’espace intellectuel de São Paulo à la suite de l’arrivée de deux professeurs français, Paul Arbousse-Bastide et Claude Lévi-Strauss, pour occuper les chaires de sociologie I et de sociologie II de la Faculté de Philosophie, Sciences et Lettres de l’Université de São Paulo au moment de sa fondation. Je n’escompte pas ici revenir sur l’histoire des sciences sociales ou des missions françaises à São Paulo, mais je souhaite montrer que cette circulation internationale comporte des nuances encore peu explorées par les études spécialisées2 2 . Des études antérieures ont développé une histoire des sciences sociales et de l’Université de São Paulo. Voir Antunha, 1974 ; Schwartzman, 1979; Cardoso, 1982; Miceli, 1989, 1995; Carlotto, 2014. Sur le rôle des missions françaises à la Faculté de Philosophie, Sciences et Lettres, voir Massi, 1988; Peixoto, 1989, 2001; Suppo, 2001; Petitjean, 1996; Lefevre, 1993; Loyer, 2015; Merkel, 2022; Consolim, 2021, 2023. . Le noyau de la controverse entre ces deux professeurs, la définition légitime des sciences humaines ou des sciences sociales à partir de l’opposition entre “philosophie sociale” et “recherche empirique”, est né dans les pays centraux, en particulier la France et les Etats-Unis, mais ses impacts sont plus fortement ressentis dans les pays périphériques, où les institutions d’enseignement sont encore en construction. Ces oppositions, associées à un ensemble plus large de préférences – relatives aux modèles institutionnels, aux pratiques scientifiques, à l’engagement politique, à la diplomatie intellectuelle, etc. – sont abordées sous l’angle des configurations dans lesquelles les deux professeurs se situent, c’est-à-dire de leurs rapports au pouvoir social et intellectuel. Ainsi, nous partons des trajectoires de ces professeurs dans leur milieu d’origine en France pour, ensuite, considérer les pratiques et représentations propres aux milieux intellectuels de São Paulo, qui ont conditionné la circulation de leurs propositions dans au Brésil. À partir des trajectoires des professeurs étrangers et des intellectuels brésiliens, deux principes de légitimation intellectuelle peuvent être identifiés à travers des affinités électives3 3 . La bibliographie spécialisée mentionne cette controverse, mais brièvement et sans prétendre extraire de cet épisode une clé d’interprétation des positions intellectuelles et des transferts scientifiques de la période. Voir Cardoso, 1987; Rubino, 1989; Peixoto, 1998; Suppo, 2001; Loyer, 2015; Silva, 2008, Valentini, 2011; Rubino, 1989; Cerqueira, 2014. .

La fondation de l’Université de São Paulo a eu lieu au cours d’une décennie extrêmement importante d’un point de vue politique, économique et intellectuel. Fruit d’un projet intellectuel mûri depuis la première décennie du XXe siècle et d’un contexte de confrontation politique entre l’état de São Paulo et le gouvernement fédéral, l’étude des différents groupes intellectuels ne peut être dissociée de leurs relations avec les groupes au pouvoir (Miceli, 1989MICELI, Sérgio. (1989), História das Ciências Sociais no Brasil, vols. 1 e 2. São Paulo, Vértice/Revista dos Tribunais., 2001MICELI, Sérgio. (2001), Intelectuais à brasileira. São Paulo, Companhia das Letras.). Il s’agit ici d’analyser ces relations en comparant deux institutions fondées en 1934, l’Institut d’Éducation de l’Université de São Paulo et le Département de la Culture de la Municipalité de São Paulo. Par ailleurs, je souhaite relier cette analyse aux transformations à l’œuvre dans l’espace transnational et notamment dans le contexte français, le cas de São Paulo permettant une compréhension plus complexe de ces transformations (Heilbron et al., 2009). L’hypothèse de ce travail est que les sympathies et les antipathies, ou plutôt les affinités électives entre les professeurs français et les intellectuels brésiliens découlent d’une homologie de position entre le champ intellectuel français et le champ du pouvoir de l’état de São Paulo. À partir d’une comparaison entre ces deux espaces, je montre que la polarisation entre les deux professeurs français a été codifiée et reliée à deux milieux intellectuels de São Paulo: d’une part, Fernando de Azevedo et les professeurs de l’Institut d’Éducation de l’Université de São Paulo; d’autre part, Mário de Andrade et les membres du Département de la Culture de la Municipalité de São Paulo. Ces deux réseaux occupent deux positions distinctes par rapport aux groupes dirigeants: respectivement, le groupe des outsiders, qui acquiert une certaine autonomie grâce au marché de l’édition et à l’expansion des institutions d’enseignement, et le groupe des établis, qui a la même origine sociale que les groupes dirigeants et bénéficie de leurs faveurs, mais sans autonomie institutionnelle. L’analyse de ce processus permet d’identifier deux styles de vie intellectuelle: l’intellectuel-professeur, véhicule de la culture légitime et défenseur de la neutralité politique, et l’intellectuel-écrivain, créateur et politiquement engagé. Alors que l’écrivain moderniste est plus proche des groupes dominants et se distingue par son style de vie cultivé et cosmopolite, l’intellectuel-professeur se spécialise, embrasse l’université et se subordonne aux classifications scolaires parce qu’il lui doit son destin.

Différents facteurs conditionnent les transferts scientifiques et intellectuels d’un pays à l’autre qui se trouve être dans une relation d’asymétrie en termes de pouvoir social et de prestige intellectuel4 4 . Sur ce sujet, voir Pollak, 2018; Palmeira, 2017; Jeanpierre, 2004, 2022; Kluger, 2018. Voir aussi Bourdieu, 2002, et Sapiro, 2016, 2019. . Dans le contexte plus général de la politique d’expansion de la culture française et de la quête de reconnaissance internationale des intellectuels brésiliens, les réseaux formés par les affinités électives sont des médiations fondamentales pour les transferts intellectuels internationaux. Dans le contexte français, les positions d’origine occupées par les professeurs français dans le champ intellectuel sont différentes et, pour cette raison, ces professeurs évaluent différemment la diplomatie intellectuelle de Georges Dumas au Brésil (Consolim, 2021CONSOLIM, M. (2021), "Circulação de intelectuais e recepção das novas ciências do homem francesas no Brasil, 1908-1932". Tempo Social, 33 (1): 17-51., 2023CONSOLIM, M. (2023), "L'enseignement des sciences sociales au Brésil: Français, Nord-Américains et Brésiliens (1933-1945)". Revue d'Histoire des Sciences Humaines, 42: 15-48.). Lévi-Strauss, qui prend une distance critique par rapport à Dumas, est un jeune diplômé proche des élites intellectuelles parisiennes et de Paul Rivet; Arbousse-Bastide, héritier de la diplomatie de Dumas, est un professeur de la province qui appartient à la “vieille génération”. Autrement dit, la décennie qui les sépare est bien plus qu’une différence d’âge, car la distance intellectuelle entre ceux qui ont été diplômés à la fin des années 1910 et ceux qui l’ont été à la fin des années 1920 est d’ordre qualitative. Ainsi, le mouvement de renouvellement ou de conservation des sciences concerne les transformations (et les transferts) entre les pays centraux eux-mêmes, où l’opposition entre “ancien monde” et “nouveau monde” est constitutive des querelles “disciplinaires”.

Ainsi, l’opposition entre “ethnologie” et “sociologie” à la Faculté de Philosophie, Sciences et Lettres de l’Université de São Paulo s’inscrit dans un processus de transformations structurelles de l’espace transnational qui a des impacts divers dans chaque contexte national. Cette opposition n’est pas d’ordre disciplinaire, mais plutôt terminologie et manifeste deux styles de vie intellectuel ainsi que deux rapports au pouvoir (Feuerhahn, 2020). Dans le cas de São Paulo, l’opposition entre ces deux “disciplines”, entre un savoir dominant, la sociologie, et un savoir dominé, l’ethnologie, est liée à des groupes intellectuels qui occupent une position inversée dans le champ du pouvoir – le savoir dominant est associé aux outsiders et le savoir dominé aux établis.

La guerre des chaires: controverses au Département de Sociologie (1935-1937)

Une polémique apparemment sans conséquences majeures a entouré les trois années qui ont vu Arbousse-Bastide et Lévi-Strauss passer ensemble au Département de Sociologie de la Faculté de Philosophie, Sciences et Lettres de l’Université de São Paulo. En 1935, année du début de la polémique, Arbousse-Bastide a 36 ans et Lévi-Strauss 27. Arbousse-Bastide était arrivé en 1934 et, seul professeur responsable de l’enseignement de la sociologie à la Faculté de Philosophie, avait demandé la création d’une seconde chaire de sociologie et avait été nommé “chef de département”. Lévi-Strauss arrive l’année suivante pour occuper la chaire de sociologie II et ne voit en principe aucun problème avec le titre de son collègue. Mais peu après, Lévi-Strauss commence à remettre en cause le titre de chef de département de son collègue au nom de la liberté de la chaire, car il veut être libre pour définir les programmes de cours de sa chaire, alors qu’Arbousse-Bastide attend du nouveau venu qu’il accepte les programmes et la répartition proposée pour les deux chaires. Dès lors, un conflit s’engage sur les sciences humaines et sociales et sur le rôle de l’université, ainsi que sur les rapports entre la vie politique et la vie intellectuelle.

Dans une lettre à Georges Dumas, Arbousse-Bastide accuse Lévi-Strauss de “cécité ambitieuse”: “Quant à Lévi-Strauss, cécité ambitieuse avec toute l’audace de l’ambition et les erreurs de la cécité. L. S. veut se rendre insupportable pour que les Brésiliens lui donnent une chaire d’ethnographie afin de maintenir la paix. Mais pour l’instant, ils ne veulent pas […]” (Arbousse-Bastide, 1936BASTIDE, Roger. (1936), "L'enseignement de sociologie en France". Revue Internationale de Sociologie, pp. 373-402.). Dans une lettre à ses parents, il attribue l’intransigeance de Lévi-Strauss à sa volonté d’obtenir un poste pour sa femme, Dina Dreyfus, qui l’a accompagné dans les missions françaises (Arbousse-Bastide, 1935). Quant à Lévi-Strauss, ses lettres à ses parents pendant son exil aux États-Unis précisent la perception qu’il a de son collègue : il refuse par avance une éventuelle invitation à retourner à l’université à cause des “histoires d’Arbousse-Bastide”5 5 . Voir Lévi-Strauss, [28/06/1941] 2015. . Lévi-Strauss revient à cette controverse plusieurs fois dans des publications postérieures pour montrer qu’il était bloqué par les élites de São Paulo et par Georges Dumas, qui protégeait son “jeune parent”6 6 . Sur la critique de Lévi-Strauss du durkheimisme et de l’esprit philosophique, ainsi que de la politique de Georges Dumas et des élites de São Paulo, voir Lévi-Strauss, Tristes tropiques, 1955, pp. 51-52 et 96-97. Plus de quatre décennies après, Lévi-Strauss revient sur le sujet dans un entretien avec Didier Eribon: “Georges Dumas avait mis un jeune parent sociologue à l’université en première année. Quand ce fut mon tour, le second sociologue en quelque sorte, il essaya de me mettre dans une position subalterne. Cela ne m’a pas plu et, lorsque j’ai résisté, il a essayé de me renvoyer au nom de la tradition comtiste, dont il était spécialiste et que mon enseignement trahissait. Les dirigeants de l’université, qui étaient aussi les dirigeants du grand journal O Estado de S. Paulo, lui ont prêté une oreille attentive ». Voir Lévi-Strauss, in Didier Eribon, 1998, p. 33. L’épisode revient aussi dans Claude Lévi-Strauss: saudades de São Paulo. São Paulo, Companhia das Letras, 2009. Jean Maugué, dans Les Dents agacees, reprend la version publiée par Lévi-Strauss selon laquelle Arbousse-Bastide était un parent de Dumas. Cette version a été reprise dans de nombreuses études, mais il n’y a en fait aucun lien de parenté entre Dumas et Arbousse-Bastide. .

Il pourrait s’agir d’un épisode confiné aux coulisses des missions et de l’histoire si ce n’était son empreinte dans la mémoire de Lévi-Strauss, j’en veux pour preuve la mention dans divers entretiens et, de manière tout aussi significative, le silence d’Arbousse-Bastide sur cet épisode quand il est interrogé sur les missions. Il est possible de faire de la discorde entre les deux hommes un point de départ pour reconstruire deux mondes différents, ou plutôt deux manières différentes de légitimer les relations entre les intellectuels et le pouvoir. A l’image de Lévi-Strauss comme “chercheur pur” s’oppose celle que dresse de lui Arbousse-Bastide comme un “intellectuel de parti”, en l’occurrence socialiste. Inversement, la neutralité ou la responsabilité éthique du professeur que prétend incarner Arbousse-Bastide est contredite par l’image de “conseiller du prince” – en l’occurrence Júlio de Mesquita Filho – que Lévi-Strauss se fait de lui.

En effet, la stratégie d’Arbousse-Bastide au Brésil est orientée vers l’accumulation de pouvoir institutionnel, ce qui le rend relativement proche des propriétaires du journal O Estado de S. Paulo (Oesp) et des professeurs de l’Institut d’Éducation, tandis que Lévi-Strauss privilégie ses recherches sur le terrain et, compte tenu du blocage de ses projets à l’université, ses contacts avec les institutions plus autonomes par rapport à l’université, comme le Département de la culture7 7 . En 1937, Arbousse-Bastide publie des éditoriaux anonymes au journal Oesp, alors que Lévi-Strauss publiera très peu dans ce journal. . Néanmoins, si l’on considère leurs milieux d’élection, les rapports s’inversent étant donné que le “chercheur” Lévi-Strauss déploie des affinités électives au sein du groupe d’intellectuels plus proche du pouvoir, alors que l’“ambassadeur” Arbousse-Bastide se rapproche d’une institution qui en est plus éloignée (Charle, 1994). Emergent ainsi à São Paulo une figuration composée par deux réseaux spécifiques, deux pratiques intellectuelles distinctes, deux sociétés scientifiques et deux politiques de rayonnement du français en Amérique Latine.

Paul Arbousse-Bastide: la carrière d’un “ambassadeur”

La première forme d’opposition entre les deux professeurs concerne la définition et les limites légitimes de la sociologie ou, plus largement, des sciences sociales. La présentation des programmes des chaires de sociologie I et II est remarquable en raison de son adresse polémique: l’exposé est fait sur le ton de la défense contre de prétendues attaques et, en même temps, sur le ton de la critique voilée du programme du collègue de l’autre chaire. Le programme d’Arbousse-Bastide est essentiellement théorique, structuré à partir de la “pensée” des auteurs “classiques” de la sociologie, et éclectique, puisqu’il associe des auteurs de la sociologie, de la philosophie et de la psychologie8 8 . Dans le programme original publié par le décret de janvier 1934, les matières suivantes figuraient au programme: psychologie sociale, anthropologie sociale et sociologie politique. Voir Oesp, 25/01/1934. Ensuite, Arbousse-Bastide a inclus ces disciplines sous la rubrique “sociologie”. Les contenus du cours de sociologie sont les suivants: sociologie générale; sociologie mentale et inter-mentale; sociologies spéciales (science des mœurs, sociologie juridique, sociologie criminelle, sociologie économique); sociologies spéciales (domestique, politique, esthétique, religieuse, linguistique, normative et appliquée, ainsi que des notions d’ethnologie). Voir Anuário, [1934-1935] 2009. Ce programme a été approuvé par le décret 7069 du 06/04/1935. . Arbousse-Bastide reconnaît s’inspirer des “orientations générales” de L’Année Sociologique, mais rejette l’idée d’un programme dogmatique, compte tenu de l’ouverture de la revue à différentes “tendances doctrinales” et de la liberté des enseignants de choisir les auteurs et les thèmes qu’ils préfèrent. Il se défend contre les attaques portées au modèle adopté, en particulier, le caractère “philosophique” du cours, justifié de la manière suivante: le public brésilien est un admirateur de Comte et la sociologie est donc pour lui une discipline “systématisée”, faite d’”idées” et de réflexions “méthodologiques”9 9 . Voir Anuário da Faculdade de Filosofia, Ciências e Letras, [1934-1935] 2009, pp. 157-174. . La transcription de certains de ses cours permet d’analyser plus finement cette proposition10 10 . Je tiens à remercier le professeur Fernando Pinheiro Filho d’avoir mis cette documentation à ma disposition. Il s’agit d’un résumé de 130 pages des contenus enseignés pendant les deux semestres de la première année et le premier semestre de la deuxième année, daté de 1938. . Arbousse-Bastide utilise principalement deux types de sources: les manuels de sociologie publiés en France et les articles publiés dans des revues françaises de l’époque, telles que L’Année Sociologique, la Revue Internationale de Sociologie et la Revue de Synthèse. En ce qui concerne la bibliographie, environ 75% des titres proviennent d’auteurs français, principalement Émile Durkheim, Gabriel Tarde, Marcel Mauss, René Worms, mais aussi René Lacombe et Daniel Essertier. Les idées des psychologues français tels que Théodule Ribot, Georges Dumas, Pierre Janet et Charles Blondel y sont également exposés. En ce qui concerne les thèmes du cours, l’accent est mis sur la relation entre la psychologie et la sociologie, sur les sujets de méthodologie et d’épistémologie, ainsi que sur la “sociologie des formes” et de l’État selon les auteurs allemands11 11 . Dans le cas des rapports entre psychologie et sociologie, d’autres sources sont utilisées: le Nouveau Traité de Psychologie de Dumas, les textes sur la IV Semaine de Synthèse d’Henri Berr, les publications du Centre de Documentation Sociale de Bouglé, ainsi que les pratiquants de la psychologie des foules. Parmi les anglo-saxons, on trouve les classiques de la psychologie sociale anglo-saxonne: Baldwin, James, Ellwood et MacDougall. Parmi les Allemands, on trouve: Freud, Stein, Wundt, von Wiese et Simmel. .

Son projet de formation supérieure est clair et implique une lutte sur deux fronts différents. D’une part, une lutte contre le modèle nord-américain, c’est-à-dire une formation spécialisée orientée vers les problèmes sociaux, basée sur les méthodes statistiques et la documentation sociale. D’autre part, une lutte contre la centralité de l’ethnologie dans le cursus, cette science étant une spécialité et ne devant donc être enseignée qu’en dernière année12 12 . “Enfin, nous avons ajouté des notions d’ethnologie la dernière année, afin de rappeler aux étudiants en sociologie que l’observation modeste et minutieuse de l’ethnographe doit constituer, avec la statistique judicieusement maniée, un instrument de valeur pour le sociologue […].” Voir Arbousse-Bastide, Anuário, [1934-1935] 2009, p. 163. . À cette époque, il publie plusieurs articles sur la notion de “culture” qui donnent à lire cette double lutte (Cerqueira, 2015; Consolim, 2023CONSOLIM, M. (2023), "L'enseignement des sciences sociales au Brésil: Français, Nord-Américains et Brésiliens (1933-1945)". Revue d'Histoire des Sciences Humaines, 42: 15-48.). Arbousse-Bastide critique la notion anthropologique de culture parce qu’elle correspond à un nivellement des “élites” par rapport aux “masses”, à une réduction du spirituel au comportemental/matériel et, enfin, parce qu’elle représente la mentalité nord-américaine13 13 . Arbousse-Bastide, Oesp, 1935; idem, Revista do Arquivo Municipal, 1935. Voir également cette controverse dans Valentini, 2011; Cerqueira, 2014; Consolim 2023. . Ces articles associaient Lévi-Strauss de manière voilée à des convictions politiques, culturelles et épistémiques suspectes. L’opposition souvent évoquée entre “esprit” et “matière” était loin d’être purement philosophique dans le contexte de 1935, lorsque les intellectuels catholiques poussaient leurs agendas concernant le contenu des cours de sciences sociales et le rôle de l’université, c’est-à-dire à une époque où l’environnement politique et intellectuel du pays évoluait rapidement vers la droite (Miceli, 2001MICELI, Sérgio. (2001), Intelectuais à brasileira. São Paulo, Companhia das Letras.).

D’autre part, Arbousse-Bastide prévoyait également la construction de centres de documentation sociale, d’abord dans le Département de Sociologie (projet qui ne s’est pas concrétisé), puis dans l’Institut d’Éducation. Dans un contexte international de prestige croissant de la recherche appliquée produite par les centres de documentation sociale dans divers pays européens, ainsi qu’aux États-Unis, l’insertion de ces institutions dans ce circuit international constituait une forme de légitimation. Les contacts avec divers centres européens s’intensifient à la recherche d’accords visant à l’échange de “documentation” (ouvrages, revues, rapports, annuaires, etc.)14 14 . Arbousse-Bastide a contacté les centres européens suivants: l’Institut international de coopération intellectuelle à Paris, le Centre de documentation sociale (CDS) de l’Escola Normal Superior, le Bureau international d’éducation (BIE) et le Bureau international du travail (BIT). Voir Archives de l’Institut d’Éducation, 1936 et 1937. Pour les lettres d’Arbousse-Bastide à Bouglé, voir les Archives Nationales Fonds de l’Ecole Normale Supérieure. Pour les lettres au Bureau international de l’éducation à Genève, voir les Archives de l’Unesco. Voir aussi les rapports d’Arbousse-Bastide aux autorités françaises du Ministère des Affaires étrangères. . Bien que, par inclination, l’explication de textes soit plus importante que le travail de documentation sociale pour Arbousse-Bastide, les transformations dans l’espace transnational et, en particulier, en France, l’amènent à investir dans “un centre de documentation sociologique spécialement organisé en fonction des intérêts économiques et sociaux de São Paulo” (Anuário, [1934-1935] 2009, p. 169). Avec le rapprochement entre Arbousse-Bastide et Fernando de Azevedo, le directeur de l’Institut d’Éducation, ces projets sont transférés à l’Institut, où deux centres de documentation sont fondés. Ces initiatives permettent de lier l’Université de São Paulo à des instances de représentation et de consécration internationales, mais aussi d’élargir sa légitimité sur le domaine scolaire, commencé en 1935, quand il participe à l’élaboration du Plan National d’Éducation aux côtés de professeurs de l’Institut d’Éducation. Ainsi, la diplomatie intellectuelle à la Georges Dumas a trouvé en Arbousse-Bastide un héritier pour étendre la suprématie intellectuelle française au Brésil.

Claude Lévi-Strauss: la trajectoire d’un “chercheur”

Lévi-Strauss, quant à lui, cherche à combattre les projets intellectuels et institutionnels d’Arbousse-Bastide. Dans la chaire de sociologie II, il entend enseigner ce qu’il appelle la “sociologie culturelle”15 15 . De nombreuses études spécialisées se sont penchées sur l’œuvre et la trajectoire de Lévi-Strauss. Il s’agit ici simplement de souligner les propriétés qui le différencient d’Arbousse-Bastide. Voir Grupioni, 1998; Suppo, 2001; Massi, 1989; Merkel, 2022; Loyer, 2015; Eribon, 1998; Lévi-Strauss, 1996. . Pour justifier sa proposition, il utilise la même stratégie que certains de ses collègues français de la même époque: critiquer la sociologie comme une science jeune et donc encore métaphysique. Ainsi, pour que cette discipline devienne véritablement scientifique, et d’autant plus, du fait que son objet central est l’étude de la “culture”, il faudrait fusionner “sociologie” et “ethnologie”. Tout en critiquant le caractère philosophique et non scientifique de la sociologie, Lévi-Strauss revendique le “véritable” héritage durkheimien pour l’ethnologie16 16 . Selon lui, le “fait social” ne serait qu’une dimension de la “culture” et, d’autre part, l’étude de la “culture matérielle” serait le moyen de traiter la culture “comme une chose”. Il souligne que Durkheim a également été soupçonné de “matérialisme” (par Tarde). En effet, Lévi-Strauss critique l’étude des “représentations” et propose de les traiter comme des “objets dépourvus de conscience”. Voir Lévi-Strauss, Anuário, [1934-1935] 2009. . En même temps, il s’empresse de défendre le sens du mot “culture” contre les soupçons de son collègue: la “sociologie culturelle” n’aurait rien à voir avec le “matérialisme historique”, le “béhaviorisme” ou l’“américanisme” – notamment parce que les fondateurs et les partisans de l’ethnologie et la culture matérielle étaient pour la plupart des Européens vivant en Amérique du Nord. En conséquence, il utilise une définition large de l’ethnologie comme la science des “modes de vie des collectivités humaines”, une science englobante par rapport aux autres sciences, de sorte que la sociologie serait définie par des études culturelles plutôt que sociales. Dans sa lutte contre le programme d’Arbousse-Bastide, Lévi-Strauss propose une révision complète du programme des chaires de sociologie tel qui impliquerait que: 1. d’exclure la philosophie sociale; 2. de traiter l’histoire de la philosophie de manière sociologique; 3. de restreindre l’enseignement de la psychologie à l’étude du caractère inné/acquis des structures mentales; 4. d’inclure l’enseignement de la logique; 5. d’inclure l’enseignement de l’ethnographie car, selon Durkheim lui-même, elle serait à l’origine des plus grandes révolutions en sociologie. Outre ces changements, il propose la mise en place d’un séminaire de recherche dès la première année du cursus afin de rapprocher l’enseignement de la recherche17 17 . Le premier cours de Lévi-Strauss s’intitule “Formes élémentaires de la vie sociale”, dans lequel il aborde les institutions domestiques, économiques, politiques et religieuses des sociétés primitives. Le second cours s’intitule “Le problème de l’état de nature et de l’état de société du XVIIIe siècle à nos jours”, cours théorique dans lequel il enseigne Rousseau, Montaigne, Locke, Hobbes, Spinoza et l’école de Manchester, en précisant toutefois que son point de vue est l’apport des sciences positives “dans le passage de la nature à la société”. Voir Lévi-Strauss, Anuário, 1936. Sur la nature théorique de ses cours, voir Florestan Fernandes 1978. .

Les projets institutionnels de Lévi-Strauss à São Paulo diffèrent également de ceux d’Arbousse-Bastide. Il s’agit d’investir dans des institutions plus autonomes par rapport à l’université, comme le montre son projet de fondation d’un Institut d’Anthropologie Physique et Culturelle, inspiré de l’Institut d’Ethnologie de Paris, dirigé par Marcel Mauss, Lucien Lévy-Bruhl et Paul Rivet18 18 . Voir Lévi-Strauss, Oesp, 1935. Voir aussi Valentini, 2011. Sur le rôle de ces instituts, voir Karady, 2011. . Il envisage en effet une institution plus libre des contraintes universitaires, avec quelques objectifs principaux: rapprocher l’enseignement et la recherche, promouvoir une formation interdisciplinaire en sciences naturelles et sociales, et former des chercheurs spécialisés. Cependant, face au refus de la direction de la Faculté de Philosophie, Sciences et Lettres de reformuler les programmes du Département de Sociologie et de soutenir la création d’un institut d’anthropologie plus autonome par rapport à cette Faculté, il en vient à se rapprocher du groupe du Département de la Culture au sein duquel sa femme, Dina Dreyfus, a trouvé un poste.

Lévi-Strauss écrit très peu dans le journal Oesp par rapport à Arbousse-Bastide, c’est un signe des relations plus distantes qu’il a avec l’élite dirigeante de São Paulo. Ses publications sont connues (son mémoire sur Marx), de même que ses liens avec Paul Rivet. Dans le contexte de l’ascension du Front Populaire, ce curriculum n’est pas fait pour attirer les milieux à São Paulo19 19 . “La France a toujours eu mauvaise presse ici. […] Lévi Strauss revient avec une ‘mission’ à l’Exposition de 37! Dans le parti, il y a un petit os à chacun. Cela aurait alors un très mauvais effet, car les Brésiliens se rendraient compte que l’Exposition est le choix du Front populaire, ce qui n’est pas fait pour les attirer.” Arbousse-Bastide, Lettre à ses parents, 1937. Sur la méfiance à l’égard des enseignants français, voir Cardoso, entretien avec Bastide 18/08/1973. Sur les suspicions à l’égard de Lévi-Strauss, cf. Loyer, 2015; Almeida, 1984; Grupioni, 1998. En 1937, Paul Rivet est exclu de l’Académie brésilienne des sciences, épisode que Dumas est appelé pour renverser la situation. cf. Rapports des Réunions de l’Académie Brésilienne de Sciences, Rio de Janeiro, 1937. . Lévi-Strauss, comme les autres membres des missions, n’a pas le droit d’écrire sur la politique dans la presse, c’est même inscrit dans son contrat. Il s’efforce donc de s’abstenir d’écrire sur des sujets controversés. Cependant, son article sur l’école unique dans L’Oesp (1935) risque d’accroître la méfiance à son égard en raison de sa défense de la démocratisation du modèle scolaire français. En outre, il avait également critiqué l’obtention par Arbousse-Bastide d’une deuxième chaire à l’Institut d’Éducation, considérant cette initiative comme une dévalorisation du statut des missions françaises. Sa prise de position provoque des tensions avec Georges Dumas, qui soutient Arbousse-Bastide. À la suite de tous ces déboires, Lévi-Strauss commence à orienter ses investissements vers des institutions extra-universitaires plus souples, ainsi que vers des milieux intellectuels dont les dispositions sont proches des siennes20 20 . La critique des professeurs français adressée à Arbousse-Bastide rappelle une prise de position critique de Bourdieu: “[…] tout enseignement supérieur qui ressemble au collège est considéré comme insupportable et de mauvais goût. On croit faire preuve de finesse en se plaçant au-dessus de tout ce qui peut ressembler à l’enseignement en classe. Chacun fait face à cette petite vanité et croit alors avoir déjà dépassé son époque de pédagogie”. Bourdieu, 1992, p. 226. .

Le champ intellectuel et universitaire dans l’entre-deux-guerres: les trajectoires françaises

Les positions prises par les deux professeurs français sont liées à leurs trajectoires et à leurs positions respectives dans le champ intellectuel français. Il est indéniable que la décision de partir au Brésil durant cette période est en partie due aux difficultés de trouver des postes plus favorables en France et même, dans certains cas, parce qu’il n’était pas toujours possible d’obtenir une bourse à l’étranger21 21 . Lévi-Strauss n’a pas obtenu la bourse de la Fondation Rockefeller pour les États-Unis. Voir Loyer 2015. Sur la mobilité des professeurs et étudiants français, voir aussi Charle, 1994, 2004. . L’entre-deux-guerres en France est marqué par des barrières à l’avancement dans les institutions universitaires, notamment à Paris, et le manque de perspectives de carrière stimule la circulation internationale des professeurs et des étudiants, ainsi que le rapprochement entre la philanthropie américaine et certaines institutions de recherche en France (Mazon, 1988MAZON, Brigitte. (1988), Aux origines de l'École des hautes études en sciences sociales: Le rôle du mécénat américain (1920-1960). Paris, Éditions du Cerf.; Tournès, 2006, 2011). Depuis le milieu des années 1920, on assiste à l’introduction des textes étasuniens en France à travers les recensions de ces ouvrages dans les revues de sociologie et de psychologie, à des mobilités de plus en plus fréquentes de professeurs et étudiants français aux États-Unis (par exemple Marcel Mauss, Célestin Bouglé ou encore Maurice Halbwachs), et à une augmentation des bourses d’études financées par la philanthropie américaine. À partir des années 1930, la Fondation Rockefeller finance des recherches empiriques (conditions de vie, etc.) et des publications à grande échelle, en partenariat avec des institutions et des groupes de recherche locaux, tels que le Centre de documentation sociale de l’École Normale Ssupérieure ou l’Institut d’Ethnologie. Cependant, la réception des travaux de sociologie, psychologie, ethnologie et anthropologie étasunienne en France dépend de la position occupée dans le champ intellectuel par les agents – ce qui distingue, par exemple, Rivet et Mauss22 22 . Mauss reste dans la stricte lignée de la sociologie durkheimienne. Suivant Hirsch, pour Mauss “[…] ‘Il faut des sociologues et des ethnologues: les uns éclairent, les autres renseignent’ – et d’une subordination des enquêtes ethnographiques à une sociologie dite “la” science sociale […]. Il se distingue en cela de Paul Rivet, préoccupé pour sa part de faire de l’ethnologie (présentée comme un nouveau nom remplaçant l’anthropologie) […]”. Cf. Hirsch, 2017, p. 358. .

Dans les années 1930, des étudiants du Centre de documentation sociale de l’École Normale Supérieure, généralement normaliens, obtiennent des bourses de la Fondation Rockefeller, comme ce fut le cas pour Raymond Aron, Robert Marjolin et Jean Stœtzel23 23 . Sur les investissements de la Fondation Rockefeller en France, voir Mazon, 1988; Tournès, 2007, 2008, 2011, 2012; Charle et al., 2004. . Des étudiants de l’Institut d’Ethnologie reçoivent également des bourses pour effectuer des recherches ethnographiques dans différents pays, notamment dans les colonies françaises, mais aussi dans les Amériques. Avec la politique de rayonnement de la culture française en Amérique latine, les jeunes professeurs de lycée commencent à viser une carrière internationale à l’étranger pour accéder à des postes universitaires. Bien que Lévi-Strauss n’ait pas fréquenté l’École Normale Supérieure ou l’Institut d’Ethnologie, son parcours peut être assimilé à celui des jeunes philosophes au parcours scolaire parisien, liés aux partis de gauche, dont les rapports avec les élites intellectuelles – Marcel Mauss, Paul Rivet, Lucien Lévy-Bruhl, Célestin Bouglé, Henri Laugier – augmentent considérablement leurs chances de réussite (Jeanpierre, 2004JEANPIERRE, Laurent. (2004), "Une opposition structurante pour l'anthropologie structurale: Lévi-Strauss contre Gurvitch, la guerre de deux exilés français aux États-Unis". Revue d'Histoire des Sciences Humaines, 11: 13-44.).

Lévi-Strauss avait, je l’ai dit, une dizaine d’années de moins qu’Arbousse-Bastide, et son parcours était, à bien des égards, distinct de celui de son collègue du Département. Son grand-père était compositeur et chef d’orchestre, son père et ses deux oncles étaient peintres. Son père était “passionné de musique et de littérature”, ce qui l’a amené à se familiariser dès son plus jeune âge avec un large éventail de productions et de débats artistiques et culturels à Paris. Si sa famille est riche en capital culturel, elle est moins bien lotie économiquement, notamment après la crise de 1929, lorsque son oncle, qui travaille à la bourse, perd sa fortune. En revanche, comme l’indique Loyer (2015)LOYER, E., (2015), Lévi-Strauss. Paris, Flammarion., son excellence académique compense sa relative dévalorisation sociale. En 1925, après avoir obtenu son baccalauréat, il se présente au cours préparatoire de l’Ecole normale supérieure de Paris, mais renonce au concours. Entre 1926 et 1929, il étudie la philosophie et le droit à la Sorbonne, obtenant une licence puis un diplôme d’études supérieures avec un mémoire sur Karl Marx, sous la direction de Célestin Bouglé. En 1931, à l’âge de 22 ans, il obtient l’agrégation de philosophie, mais n’enseigne que deux ans, participant aux mouvements syndicaux des enseignants. Dès son plus jeune âge, il est politiquement actif, lié au Parti socialiste et, pendant un temps, assistant parlementaire d’un député socialiste. Ses liens avec les intellectuels de gauche se sont construits dès les années 1920, ce qui lui confère un capital de relations sociales bien supérieur à celui de son collègue. Les relations de Lévi-Strauss avec les milieux artistiques parisiens s’élargissent du fait de sa fréquentation de l’avant-garde esthétique autour de la revue Documents, où publient de nombreux surréalistes et ethnographes24 24 . Sur les rapports entre ethnographie et avant-garde esthétique, voir Vincent Debaene, 2010; voir aussi Loyer, 2015. .

Ses relations avec les personnalités les plus importantes des sciences sociales et des sciences naturelles, surtout après 1930, ont été très importantes pour sa carrière au Brésil. D’abord avec Célestin Bouglé, qui l’a recommandé à Georges Dumas pour les missions françaises. Ensuite avec Marcel Mauss, qui commence à guider le couple dans ses recherches sur le terrain. Dès 1931, il est en contact avec Paul Rivet, lorsque son père reçoit une commande de peinture murale pour l’Exposition Coloniale. Grâce aux réseaux constitués par les praticiens et les professeurs de sociologie, d’anthropologie, d’ethnologie et de psychologie, il bénéficie également de la bienveillance de Jean Marx, responsable du Service des œuvres au Ministère Français des Affaires Étrangères. Pendant son séjour au Brésil, Lévi-Strauss et Dina Dreyfus ont correspondu avec tous ces professeurs, obtenant des conseils scientifiques de certains et un soutien financier d’autres – comme Henri Laugier, psychologue, socialiste et président de la Caisse Nationale de la Recherche Scientifique, l’embryon du CNRS. Après ses expéditions, il commence à recevoir des invitations pour présenter les résultats de ses recherches et, au début de la Seconde Guerre mondiale, même Dumas l’invite à retourner au Brésil en tant que professeur à l’Université du Brésil25 25 . Voir les archives du Musée National d’Histoire Naturelle. Fonds Paul Rivet. Sur la correspondance avec Bouglé, voir les Archives Nationales, Fonds de l’École Normale Supérieure. Pour la correspondance avec Dumas, voir les archives du Ministère des Affaires Étrangères. Pour la correspondance avec Mauss, voir les Archives du Collège de France, fonds Marcel Mauss. . Lévi-Strauss semble avoir largement bénéficié des différents mondes dans lesquels il a vécu: il a pu se réclamer de la tradition durkheimienne et, en même temps, critiquer sa dimension “philosophique” au nom de la “science”, c’est-à-dire de l’ethnologie/ethnographie; il a pu dénoncer la position d’“ambassadeur” de son collègue du Département de Sociologie et, en même temps, devenir “ambassadeur” aux États-Unis26 26 . Les travaux de Laurent Jeanpierre sur l’exil de Lévi-Strauss aux États-Unis ont été les premiers à souligner l’importance du capital social accumulé par Lévi-Strauss pour sa carrière et, plus encore, à étudier cette question en opposant son style de vie intellectuel à celui de Georges Gurvitch. Au Brésil, cependant, Lévi-Strauss incarne le “chercheur” plutôt que l’“ambassadeur”. Néanmoins, dans les deux contextes, il entretient des relations tendues avec les “théoriciens” ou pratiquants d’une “philosophie sociale”. Voir Jeanpierre, 2004, 2022. Cf. aussi Charle, 1994. .

Il est possible que la critique de la sociologie durkheimienne, très en vogue à l’époque, s’inscrive dans un climat d’insatisfaction à l’égard du système universitaire français en raison de l’absence de perspectives de carrière en France. Des exemples de ce climat d’insatisfaction peuvent être trouvés dans deux bilans de la sociologie française publiées à cette époque, par Raymond Aron (1937)ARON, R. et al. (1937). Les Sciences sociales en France: Enseignement et recherche. Paris, Flammarion. et Roger Bastide (1935). Aron considère qu’il est indispensable de réviser la dimension philosophique de la théorie de Durkheim pour parvenir à une science positive; il prône également un rapprochement entre les différentes sciences sociales (sociologie, économie, histoire, psychologie) et conditionne le progrès de la sociologie à l’investissement dans la recherche empirique et coordonnée27 27 . Selon Aron: “[…] on regrettera, cela va de soi, de ne pas rencontrer chez nous d’Instituts de sociologie comme plusieurs pays en connaissent. Aux Etats-Unis, en particulier, on peut mesurer les services qu’ils rendent: rassemblent les résultats des recherches spéciales, préparant des traités pour la formation des maîtres, mettant sur pied de grandes enquêtes collectives”. Aron, 1937, p. 40. . Ce dernier point, la réalisation de recherches empiriques et coordonnées, présuppose le modèle institutionnel américain de l’institut, puisque les “instituts”, contrairement aux universités, “regroupent les résultats de recherches spécialisées”, réalisent de “grandes enquêtes collectives” et publient les résultats dans des traités/manuels. Aron souligne ainsi l’importance d’une réforme institutionnelle avec la fondation de nouvelles institutions pour l’avancement de la science, un projet qui favoriserait un plus grand contact avec la “réalité sociale” (Aron, 1937). En France, les exemples de cette innovation institutionnelle seraient, selon lui, l’Institut d’Ethnologie, l’Institut de Droit Comparé, le Centre d’Études de Politique Étrangère et le Centre de Documentation Sociale de l’École Normale Supérieure. L’autonomie par rapport à l’université serait garantie par la création d’un Conseil national composé de membres de ces “instituts”. Le bilan sur l’enseignement de la sociologie en France que dresse Roger Bastide (1936)BASTIDE, Roger. (1936), "L'enseignement de sociologie en France". Revue Internationale de Sociologie, pp. 373-402. a des différences importantes avec celui d’Aron, mais aussi des points de recoupement. Bastide prend pour objet les manuels de sociologie, qui devraient être révisés pour offrir un enseignement plus appliqué ou pratique, c’est-à-dire visant à enseigner les méthodes et techniques de recherche pour l’étude des problèmes contemporains “concrets”. L’enseignement supérieur devrait encourager les études sur les réalités concrètes afin de former des “experts”, comme aux Etats-Unis28 28 . “Nos législateurs seraient donc certainement honorés d’avoir des professeurs de sociologie à leurs côtés. Nous savons le rôle clé que jouent les professeurs de sociologie dans la vie pratique américaine. Nous savons que notre science a été appelée à prendre part aux débats du forum en France aussi.” Roger Bastide, 1936, p. 396. . Bastide, comme Aron, considère que la création d’institutions indépendantes est positive, mais préfère mettre l’accent sur les réformes par l’augmentation des postes universitaires, comme celui de “directeur des travaux”. Ainsi, ces deux auteurs, qui occupent deux positions différentes dans le champ intellectuel, Bastide étant professeur dans un lycée de l’enseignant du secondaire en province, Aron doctorant au Centre de documentation sociale à Paris, associent la critique de la sociologie durkheimienne ou des manuels de sociologie à la crise du système universitaire français. D’autre part, ils proposent deux types de renouvellement institutionnel: dans le cas d’Aron, la voie est externe à l’université; dans le cas de Bastide, la préférence va à la fondation de nouveaux postes d’aide à la recherche empirique à l’intérieur de l’université (Karady, 2011KARADY, V. (2011), "Durkheim e os primórdios da etnologia universitária". Antropolítica: Revista Contemporânea de Antropologia, 1 (28).).

En comparant ces deux positions avec les pratiques de leurs deux collègues du département, il est indéniable que la position insoumise de Lévi-Strauss est plus proche de la position critique d’Aron, tandis que la confiance de Roger Bastide dans l’université et ses préférences pour les questions pédagogiques rejoignent celles de son ami Arbousse-Bastide. Ces prises de positions sont liées à leurs trajectoires respectives29 29 . Voir le dossier de retraite de Paul Arbousse-Bastide, Archives Nationales. . Arbousse-Bastide (1899-1985) est originaire du Gard, dans le sud de la France, d’une famille protestante dont le père est pasteur. Le souci du fils adulte d’assurer un logement et un meilleur niveau de vie à ses parents indique que la famille ne possédait pas beaucoup de biens. Son parcours scolaire et supérieur est difficile: il obtient un baccalauréat ès lettres (1917) et, après son service militaire, une licence (1920) et un diplôme d’études supérieures (1921) à la Sorbonne. Il ne réussit pas à passer le concours de l’École Normale Supérieure et n’obtient son diplôme de l’agrégation qu’en 1928, après quatre tentatives et sept années d’études. Pendant ce temps, il doit travailler pour poursuivre ses études: entre 1922 et 1925, il enseigne dans une école protestante du sud de la France et, après 1925, dans trois collèges et lycées. Il a ainsi accumulé plus d’une décennie d’enseignement lorsqu’il arrive au Brésil.

Au début des années 1930, ses publications portent sur des questions pédagogiques et sur l’enseignement de la philosophie. Toujours en France, il fonde avec un autre professeur de philosophie, Georges Bénézé, disciple d’Alain, la revue Méthode: Revue de l’Enseignement Philosophique, qui ne dure que deux ans et dont l’objectif est de discuter des nouvelles méthodes et des nouveaux sujets dans l’enseignement de la philosophie. L’intérêt d’Arbousse-Bastide pour le mouvement international dans le domaine de l’éducation se révèle, par exemple, en 1932, lorsqu’il écrit au Bureau International de l’Éducation, dirigé par Jean Piaget, à Genève, pour obtenir des informations sur le Centre de Pédagogie de l’institution – le Centre Jean-Jacques Rousseau. En 1936, en tant que responsable de la Méthodologie de l’enseignement secondaire à l’Institut d’Éducation de l’Université de São Paulo, il reprend contact avec le Bureau30 30 . “J’aimerais beaucoup vous entretenir de ces cours de pédagogie par correspondance que j’aimerais organiser pour les instituts français avec la collaboration de l’Institut J. J. Rousseau.” Voir Arbousse-Bastide, Archives BIE, 1932. En 1936, il déclare: “Je n’ai pas non plus oublié les projets de relations documentaires que je desirais organiser à São Paulo avec le BIE en particulier […]”. Arbousse-Bastide demande un plan de classement de la documentation pédagogique et déclare vouloir adhérer au Bureau. Voir Arbousse-Bastide, Archives du BIE, 1936. . Le parcours d’Arbousse-Bastide s’inscrit donc dans la génération des professeurs de philosophie issus de collèges ou de lycées de province, soucieux de réformer l’enseignement de la philosophie par la sociologie, notamment par la théorie sociologique, alors même qu’ils sont intéressés à fonder des centres de documentation. Son séjour au Brésil, recommandé par Dumas, son professeur à la Sorbonne, n’est pas étranger à son intérêt pour l’œuvre de Comte et, plus encore, pour le positivisme brésilien – sujet de ses thèses de doctorat, soutenues dans cette université en 1954.

Au Brésil, les réseaux d’Arbousse-Bastide sont centrés autour des personnes occupant des postes de pouvoir à l’université de São Paulo et à l’Institut d’Éducation, ainsi qu’autour des autorités du Ministère des Affaires Étrangères, du consulat de France à São Paulo et de l’ambassade à Rio de Janeiro. Sa crainte, selon les lettres adressées à ses parents, était de ne pas pouvoir occuper un poste à l’université ou dans un lycée à Paris après son retour en France. Il a peu de contacts dans les milieux parisiens des sciences sociales, puisqu’il ne reçoit aucune réponse de Paul Rivet et seulement une brève réponse de Célestin Bouglé à sa demande d’orientation sur ses cours et son projet de fondation d’un Centre de documentation économique et sociale à São Paulo. La grande majorité de sa correspondance porte sur des questions administratives et politiques concernant les missions françaises (salaires, postes, fonctions, etc.), en particulier avec Georges Dumas, à qui il s’adresse pour se plaindre de son collègue du département, ainsi qu’avec Jean Marx et les autorités brésiliennes et françaises. Son attitude est celle d’un “chef de mission”, fonction qu’il a occupée dans les premières années, et d’un professeur qui se consacre à la diffusion de la culture française au Brésil. Ce sont des dispositions liées à sa longue carrière de professeur de philosophie dans le secondaire, loin de la vie intellectuelle parisienne, fruit de l’école républicaine à laquelle il doit son ascension.

En comparant les deux trajectoires, on peut dire que le dépassement des classifications scolaires est à la portée de Lévi-Strauss en raison de ses dispositions qui le prédisposent à prendre les risques liés à la pratique d’une science nouvelle et l’inclinent à l’insoumission par rapport à la diplomatie “officielle”, tout en pratiquant un nouveau type de diplomatie intellectuelle, moins médiatisée par l’État et l’université publique et fondée sur des accords passés directement entre chercheurs et bailleurs de fonds31 31 . Il est important de souligner que Lévi-Strauss ne gardait pas un souvenir impérissable du Brésil et ne signalait un éventuel retour que s’il n’avait pas d’autre option. Ses contacts avec Fernando de Azevedo n’ont eu lieu qu’en 1942, alors que ce dernier était directeur de la Faculté de Philosophie, et sont restés dans les limites de leurs stricts intérêts. D’ailleurs, l’invitation à revenir n’est jamais venue. Dans ces lettres, il se montrait conscient des tensions lors de son séjour au Brésil et du prestige de sa nouvelle position: “Comme mes collègues de São Paulo semblent me jeter des regards d’envie, je suppose que ma présence à New York a dû redorer mon blason là-bas”. Voir Lévi-Strauss, 2015, p. 522. . En d’autres termes, une circulation des personnes et des ressources plus libres des contraintes institutionnelles et étatiques. Arbousse-Bastide, en revanche, est soumis aux classifications scolaires et aux instances qui définissent les règles universitaires, compte tenu de son parcours familial, scolaire et professionnel en France. Ces positions dans le champ intellectuel français ont eu un impact au Brésil, car elles ont favorisé les affinités électives dans ce nouveau contexte.

Les médias intellectuels de São Paulo: le champ des possibles

Au cours des années 1930, les tensions politiques et intellectuelles dans le pays ont eu un impact majeur sur les universités nouvellement créées, avec le risque de fermeture ou de licenciement des professeurs32 32 . Sur les universités de São Paulo dans le contexte de l’ère Vargas, voir Miceli, 1989, 1995. Voir aussi Schwartzman, 1979; Antunha, 1974, 1975. . L’une des stratégies les plus utilisées comme forme de combat, de la part des intellectuels catholiques, consistait à souligner le manque de qualification ou l’échec au concours des professeurs brésiliens nouvellement nommés, afin de les délégitimer dans leurs nouvelles fonctions et, dans le cas des Français, d’éveiller des soupçons sur leurs préférences idéologiques33 33 . La correspondance d’Arbousse-Bastide à sa famille et celle de Fernando de Azevedo à Venâncio Filho sont révélatrices à cet égard. Voir Papiers Arbousse-Bastide; Penna, 1987. . En l’absence d’instances internes de consécration, les professeurs brésiliens, notamment à l’Institut d’Éducation, dépendaient de la reconnaissance de leurs publications par les professeurs français. Dans le contexte de l’expansion du marché de l’édition, les auteurs des manuels de sociologie, psychologie, biologie, etc. attendaient une validation de leurs ouvrages. Du côté des professeurs français, il fallu compter sur le prestige de la France, et de Dumas en particulier, auprès des autorités brésiliennes, ainsi que sur le soutien de leurs collègues brésiliens. En d’autres termes, les relations entre les professeurs étrangers et les intellectuels brésiliens ne se limitaient pas à une coopération pour le transfert de connaissances, mais étaient basées sur un soutien mutuel au profit des deux parties34 34 . Les intellectuels nationalistes, catholiques et autres critiques de la Faculté de Philosophie, Sciences et Lettres font d’attaques violents à ceux manuels, comme c’est le cas du compte rendu d’Alexandre Correa dans la revue catholique A Ordem. Le manuel de sociologie de Fernando de Azevedo, par exemple, a été considéré comme du durkheimisme dépassé et dogmatique, étant donné les critiques de Déploige. Voir Correa, 1935. .

Les transferts scientifiques et intellectuels se font au gré des alliances, et la manière dont chacun accumule du prestige est très différente. Lévi-Strauss a vu ses expéditions financées en partie, en accord avec Mário de Andrade, par le Département de la Culture; Arbousse-Bastide a eu la publication de sa thèse financée en partie par le Ministère des Affaires Étrangères brésilien, par l’intermédiaire de Fernando de Azevedo. En considérant les préférences de Arbousse-Bastide envers l’Institut d’Éducation et de Lévi-Strauss envers le Département de la Culture, on peut faire l’hypothèse que les hiérarchies ont été transférées du champ intellectuel français au champ du pouvoir à São Paulo. Dans le contexte français, Lévi-Strauss était la figure proche des intellectuels parisiens alors qu’Arbousse-Bastide était très éloigné de ce monde; dans la configuration brésilienne, les écrivains du Département de la culture, légitimés par leur esprit cultivé et leur capital cosmopolite, avaient des rapports familiaux et personnels avec les groupes dirigeants de São Paulo, alors que les professeurs de l’Institut d’Éducation étaient plus éloignés des groupes dirigeants, le principe de légitimation de ce milieu étant leur capital spécifique. Afin de différencier ces deux milieux, il faut comparer les trajectoires des principaux membres des deux institutions.

L’Institut d’Éducation: l’ascension scolaire

Arbousse-Bastide se rapproche des professeurs de l’Institut d’Éducation en prenant la chaire de Méthodologie de l’enseignement secondaire, poste qu’il occupe entre 1936 et 193735 35 . Pendant la période où il a occupé cette chaire, il a également été rémunéré pour cette fonction, comme l’indique sa correspondance à ses parents. Arbousse-Bastide doit quitter son fauteuil à la fin de l’année 1937, à la suite du décret présidentiel interdisant le cumul des postes dans la fonction publique. Sur la section de l’enseignement secondaire, voir Evangelista, 1997; Bontempi, 2011. . L’initiative est critiquée par les professeurs français proches de Lévi-Strauss, qui voient dans cette implication, selon Arbousse-Bastide, une diminution de leur prestige. En fait, l’Institut d’Éducation avait un statut inférieur à l’Université de São Paulo et même par rapport à la Faculté de Philosophie, puisque l’Institut était issu de l’École Normale primaire et secondaire de São Paulo et maintenait, même à l’université, les écoles d’apprentissage et les cours de formation des enseignants.

Si l’on ne considère que l’“élite” de l’Institut, c’est-à-dire les professeurs des chaires en 1937, on trouve: Fernando de Azevedo, Antônio Ferreira de Almeida Júnior, Roldão Lopes de Barros, Noemy da Silveira (Rudolfer) et Milton da Silva Rodrigues36 36 . Pour cette section, ont été consultés les ouvrages et les documents suivants: Andrade, 2023; Oriani, 2022; Angelini, 2002; Azevedo, 1936, 1961; Costa, 2007, 2011; Nascimento, 2012; Bontempi, 2011; Vidal et al., 2019, 2020; Pinheiro et Miceli, 2008. . Tous ont été professeurs d’écoles normales primaires ou secondaires, bien qu’ils aient parfois obtenu des diplômes d’ingénieur, de médecin ou de juriste. En 1920, Lopes de Barros réorganise l’École Normale primaire du Brás, une école située dans un quartier ouvrier, où il rencontre Almeida Júnior, Noemy Silveira et Milton Rodrigues, qui y sont alors professeurs. La même année, il effectue un recensement des écoles pour contribuer aux réformes de Sampaio Doria. En 1926, une partie de ce groupe, en plus de Sampaio Doria et Lourenço Filho, fonde le lycée privé Rio Branco, situé dans un quartier “noble”. En 1932, Azevedo, Silveira, Barros, Rodrigues et Almeida Júnior dispensaient le cours de perfectionnement à l’École Normale de São Paulo (alors connu sous le nom d’Instituto Pedagógico). La même année, tous, à l’exception de Milton Rodrigues, ont signé le Manifeste des Pionniers de l’Éducation Nouvelle. En raison de leur formation technico-scientifique, ils ont tous occupé des postes techniques dans l’administration publique de l’état de São Paulo.

Il s’agit d’un groupe d’enseignants dont les familles ont connu l’instabilité économique (certains sont orphelins d’un parent), ce qui les a rendus relativement plus dépendants de l’école comme moyen de promotion sociale37 37 . Dans deux cas, cependant, d’autres facteurs d’instabilité apparaissent. Almeida Júnior a reçu un héritage à la mort de sa mère à l’âge de 21 ans, et Fernando de Azevedo, issu d’une famille riche en déclin, a semblé retrouver sa position initiale après avoir épousé la fille unique d’un médecin militaire et actionnaire de Banco União, qui est décédé peu de temps après. Cf. Almeida Jr., 1966; Azevedo, 1971. . Même s’ils ont obtenu des diplômes d’enseignement supérieur, à l’exception de la seule femme du groupe, ils ont dû travailler parallèlement à leurs études. Azevedo et Barros sont entrés à la Faculté de Droit de São Paulo en 1919, âgés respectivement de 19 et 29 ans; Milton Rodrigues a étudié à l’École Nationale d’Ingénieurs de Rio de Janeiro, et Almeida Júnior a étudié la médecine à la Faculté de Médecine et de Chirurgie de São Paulo, obtenant également son diplôme tardivement, à l’âge de 29 ans. Pendant ses études, Almeida Júnior a vécu dans une pension et a enseigné à l’Institut Disciplinaire le soir. Il soutient sa thèse sur l’assainissement public, devient assistant à l’Institut d’Hygiène et, en 1931, maître de conférences, lorsqu’il rejoint la chaire de médecine publique de la Faculté de Droit, devenant professeur de médecine légale au cours de la décennie suivante. Almeida Júnior et Fernando de Azevedo ont occupé des postes importants au sein du Département de l’éducation de l’état de São Paulo, ont collaboré à la rédaction du code de l’éducation de 1933, ainsi qu’au projet de l’Université de São Paulo. Leurs relations avec le gouvernement de l’état de São Paulo, donc, ont été médiatisées par leur contribution spécifique à l’éducation, notamment par leurs publications. Pour les plus jeunes, Silveira et Rodrigues, leur légitimation en tant que professionnels de l’éducation était encore plus marquée, et ils ont été appelés pour faire de la recherche appliquée dans le but de soutenir des politiques publiques.

Ainsi, ce groupe avait en commun un milieu social plus modeste, nécessitant un investissement beaucoup plus important dans l’excellence scolaire et l’acquisition de savoirs d’application (statistiques, administration scolaire, hygiène, orientation professionnelle, assistance etc.). Dans leurs écrits, ils sont connus pour leur contribution aux questions d’éducation, ce qui indique que ce capital spécifique est à la base du rôle de “conseiller du prince” qu’ils ont parfois joué. Ils excellaient dans les domaines de la biologie, de la psychologie et de la sociologie de l’éducation, mais aussi dans les statistiques et autres méthodes quantitatives (Milton Rodrigues). Leurs compétences en psychologie (Noemy Silveira), en biologie (Almeida Júnior) et en sociologie (Fernando de Azevedo) étaient considérées de manière intégrée, c’est-à-dire que leur sens était donné par leur collaboration mutuelle, raison pour laquelle il est difficile d’autonomiser l’étude de chacune de ces sciences à cette époque. À tel point que leurs publications ont été intégrées dans les mêmes collections didactiques de l’époque: tous, à l’exception de Barros, ont publié dans les trois collections de la Bibliothèque pédagogique brésilienne dirigée par Fernando de Azevedo (Toledo, 2020). En d’autres termes, le capital de relations entre les groupes dirigeants, fondamental pour leur ascension, était fonction de leur capital technico-scientifique – parfois accumulé grâce à des bourses d’études (Silveira et Rodrigues). En outre, le volume de leurs publications, dans le contexte de l’expansion du marché des manuels scolaires, leur a également conféré une certaine autonomie par rapport aux revers politiques. Ils n’ont pas publié de mémoires, à l’exception de Fernando de Azevedo, qui était, ce n’est pas par hasard, le plus proche des élites dirigeantes, de sorte que leur postérité n’est consignée que dans les témoignages d’anciens étudiants et collègues.

En considérant le profil de ce groupe, on peut relever des affinités entre eux et les dispositions d’Arbousse-Bastide, ce qui peut expliquer aussi son investissement dans l’Institut d’Éducation. Comme l’avait dit Georges Dumas (1924), la France devait valoriser les formations en sciences appliquées pour s’imposer dans les pays de l’Amérique Latine qui avaient besoin d’expertise. Arbousse-Bastide adopte donc deux stratégies: d’une part, il participe à la création de centres de documentation et de laboratoires de recherche sociale pour légitimer le caractère scientifique et appliqué de l’Institut d’Éducation; d’autre part, il oriente son enseignement vers la philosophie de l’éducation, en s’appuyant sur une approche normative des idées pédagogiques et sociales – dans un esprit “désintéressé” et inspirée du modèle des lycées français38 38 . Voir la lettre d’Arbousse-Bastide au Bureau International de l’Éducation, 1937; Lettre d’Arbousse-Bastide à Bouglé, 1937; Archives de l’Institut d’Éducation (AIE), 1937. Lettre de Bouglé à Fernando de Azevedo, IEB, 1936. Dans les papiers personnels de la famille, on trouve trace des contacts d’Arbousse-Bastide avec des organisations de coopération intellectuelle. Dans un rapport au Ministère des Affaires Étrangères, il indique que “São Paulo souhaitait bénéficier de la documentation de ces organisations et leur fournir à son tour une documentation sur les problèmes économiques, sociaux et politiques du Brésil”. Les centres contactés par le professeur sont les suivants: Centre d’études et de documentation de l’École normale supérieure (Célestin Bouglé); Centre d’études de politique étrangère (Demery); Centre de recherches économiques et sociales (Charles Rist); Centre de recherches sociales de l’Université de Paris (Vaucher). Voir “Efforts de liaison entre certains organismes de documentation internationale à São Paulo”. Documents de la famille Arbousse-Bastide. . L’orientation vers la philosophie sociale et pédagogique, résultat de ses dispositions et de sa position de membre des missions, est liée à des investissements en “ingénierie sociale”, résultat d’une reconversion partielle due à son inclusion dans l’Institut de l’Éducation et au prestige international lié à ces nouvelles pratiques39 39 . Entre 1936 et 1938, 113 étudiants se sont inscrits à l’Institut d’Éducation pour obtenir le diplôme de professeur primaire ou secondaire. Les informations concernent l’âge, le sexe, le lieu de naissance et l’origine institutionnelle à l’USP. Les étudiants ont une moyenne d’âge de 23 ans, viennent de la campagne, sont majoritairement des femmes (13 % en 1936 et 66 % en 1938) et viennent de la Faculté de Philosophie (cours de philosophie, géographie, histoire, sciences sociales et politiques et langues étrangères). Après la deuxième année de fonctionnement de la Faculté de Philosophie, le profil des étudiants de l’Institut d’Éducation est devenu similaire à celui de la Faculté parce que les enseignants ont été autorisés à fréquenter l’université sur la base d’un commissionnement. Voir Evangelista, pp. 165-168. Voir aussi Limongi, 1989; Miceli, 1989. .

Fernando de Azevedo, directeur de l’Institut de l’Éducation, a lui aussi cherché à concilier son durkheimisme avec l’expertise, puisque son projet pour l’Institut portait sur l’exercice de certaines fonctions du Département de l’Éducation de l’État de São Paulo et même sur une future politique nationale de l’éducation, en vue de la candidature du gouverneur de São Paulo à la présidence (élections présidentielles de 1937). Sur le plan politique, il était impératif de constituer une base de données sur l’éducation à São Paulo et ces centres de documentation permettaient à l’Université de São Paulo d’échanger des informations directement avec des institutions étrangères, sans passer par l’intermédiation du gouvernement fédéral brésilien – alors adversaire de São Paulo. En matière d’éducation, Arbousse-Bastide et Fernando de Azevedo s’accordent sur le modèle français d’enseignement secondaire, fondé sur une culture humaniste par opposition à une spécialisation à l’américaine, mais maintiennent leurs divergences quant au contenu de cet enseignement: humanités classiques pour Arbousse-Bastide et humanités modernes pour Azevedo (Mokrejs, 1984MOKREJ, Elisabete. (jul./dez. 1984), "A propósito do cinquentenário do "Curso de Metodologia do Ensino" na USP: uma nota histórica". Revista da Faculdade de Educação, São Paulo, 10 (2): 345-357.; Arbousse-Bastide, 1944ARBOUSSE-BASTIDE, Paul. (1944), Formando o homem: contribuição para o plano de um ginásio ideal. São Paulo, Sociologia Editoria.)40 40 . Formando o homem (1944), préfacé par Azevedo, avec une traduction d’Antonio Candido. Voir Lettre d’Arbousse-Bastide remerciant Fernando de Azevedo: “Nous sommes tout à fait d’accord sur certains points essentiels, comme la fonction de culture générale et désintéressée que doit remplir, sinon exclusivement, du moins principalement, l’enseignement secondaire, et l’opportunité exceptionnelle de ce type d’enseignement, destiné aux adolescents”. Azevedo, 1944, p. XVIII. .

Deux centres de documentation ont été créés à l’Institut de l’Éducation: le Centre de Documentation et Études Pédagogique (CDP), lié à la chaire de méthodologie de l’enseignement secondaire d’Arbousse-Bastide, et le Centre de Documentation Ethnographique et Sociale (CDES), lié à la chaire de sociologie de l’éducation de Fernando de Azevedo. Le premier CDP avait été conçu comme un centre “coordonnant toutes les données, informations et initiatives intéressantes pour l’étude de nos propres problèmes éducatifs, publics et privés, au sein de l’État, de nature historique, statistique et fonctionnelle”41 41 . “Bien qu’il soit né sous l’inspiration de l’Institut international de Paris, qui nous a été apporté par l’intermédiaire de l’illustre professeur Paul Arbousse-Bastide, le ‘Centre’ ne remplira la mission pour laquelle il est appelé que s’il est lancé sur la base d’un service éminemment local, c’est-à-dire en tant qu’organe de coordination, lui-même, de toutes les données, informations et initiatives qui intéressent les études de nos propres problèmes d’éducation, publique et privée, à l’intérieur de l’État […]”. Archivos do Instituto de Educação, 4, 1937, p. 239. . En d’autres termes, le Centre devait être un “instrument de coopération” et jouer à São Paulo le même rôle que l’Institut de Coopération Intellectuelle de Paris au niveau international. Le rôle central dans le projet éducatif du groupe est indiqué dans les objectifs du CDP: fournir des lignes directrices et permettre la collaboration entre toutes les chaires de l’Institut; établir une correspondance avec les organismes d’information officiels; établir un service pour guider la recherche pédagogique à São Paulo et créer un dépôt pour consulter les recherches effectuées; diffuser les résultats de ces initiatives dans la revue Archivos do Instituto de Educação (AIE, 1937, p. 241). Le CDES, fondé en 1937, était une annexe du Laboratoire de Recherche Sociale, installé auprès de la chaire de sociologie de l’éducation de Fernando de Azevedo. Le laboratoire abritait également un musée d’ethnographie, qui a même accueilli la première exposition d’une collection de Curt Nimuendaju42 42 . En janvier 1937, Nimuendajú déclare à Baldus: “L’Institut d’Éducation de l’Université de São Paulo m’a acheté une collection de Canela. Et non seulement il l’a achetée, mais il l’a payée! Fernando de Azevedo était sur mon dos à cause du matériel pédagogique – des jouets indiens entre autres – et, comme je ne pouvais pas les séparer du reste de la collection, il a immédiatement acheté tout le bric-à-brac, 391 pièces, pour 8 contos”. Lettre de Nimuendajú à Baldus Belém do Pará, 13 janvier 1937. Ce à quoi Baldus répond: “En tout cas, l’acquisition de votre collection par l’Institut d’Education a donné à Fernando l’envie d’y organiser une sorte de Musée Ethnographique, sous le nom de “Centre de Documentation Sociale et Ethnographique”, qu’il a l’intention de me confier. De plus, stimulé par votre lettre, il souhaite que je voyage afin de rassembler des collections pour ce musée”. Baldus, 5 février 1937. Voir la liste des 391 pièces dans la revue Archivos, 4, 1937, pp. 125-126. . La collection était considérée par Fernando de Azevedo comme “adaptée à l’enseignement de la sociologie” et comme un “stimulant pour la recherche sociale rigoureusement scientifique” (AIE, 1937, p. 125). Cependant, dans la revue Archivos de l’Institut de l’Education, l’exposition est inscrite dans le domaine des “sociologies des tribus”, ce qui est révélateur des conflits de classification “disciplinaire” impliquant l’Institut de l’Éducation et le Département de la Culture – qui, à cette époque, abritait la Société d’Ethnographie et de Folklore43 43 . “Le Centre de documentation ethnographique et sociale de l’Institut de l’Éducation a déjà conclu un accord avec d’autres ethnologues afin qu’ils entreprennent, au service des musées respectifs, des enquêtes systématiques dans les régions susmentionnées, dans le but de recueillir le plus de matériel authentique et significatif possible. M. Herbert Baldus, par exemple, dont on connaît déjà plusieurs travaux sur la sociologie générale et surtout la glottologie des Zamuka et des Kashishá, s’est chargé de la mission concernant les Indiens Coroados ou Kaingang, avec lesquels le musée en cours d’organisation connaîtra un développement considérable.” Voir Archivos do Instituto de Educação, 1937, 4, p. 126. . En d’autres termes, la dispute sur les fonctions et les attributions institutionnelles s’accompagne de controverses sur la définition légitime des sciences de l’homme.

Tableau 1
: Institut d’Éducation de São Paulo (1934-1938)

À partir du milieu des années 1930, le Brésil est devenu un acteur majeur de l’Organisation Internationale de Coopération Intellectuelle grâce au travail de Miguel Ozório de Almeida, président de la Commission Nationale de Coopération Intellectuelle. En 1936, Ozório de Almeida nomme une sous-commission à São Paulo, composée entre autres de Julio de Mesquita Filho et Mário de Andrade, et l’année suivante, encore de Fernando de Azevedo et Almeida Júnior. La Commission était inspirée par la volonté de Paul Valery (1933) de créer une “société internationale des esprits”44 44 . Il s’agit d’encourager une “société des esprits” pour un “désarmement moral”, fondé sur l’acceptation d’une “doctrine morale universelle” et l’utilisation de “méthodes scientifiques” pour comprendre la réalité contemporaine. Archivos do Instituto de Educação, vol. 3, 1937, pp. 13-15 et 238-242. Voir aussi Dumont, 2008; Renoliet, 1981. . Quant au rôle de l’éducateur, il lui revient d’occuper une place prépondérante car son action doit être un médiateur entre science et politique: “[…] à l’éducateur, qui doit être avant tout un sociologue, qu’il appartient de seconder les diplomates dans la tâche magnifique et capitale du désarmement moral” (Bulletin Cici, 1934, p. 57). De plus, il était aussi requis afin d’organiser la révision des manuels scolaires dans le but de réformer la mentalité des élèves au nom de la paix mondiale. Dans le contexte brésilien, Fernando de Azevedo a adapté ces lignes directrices aux objectifs d’un projet de “civilisation” nationale basé sur l’Institut de l’Éducation de l’Université de São Paulo et, comme forme de légitimation, la publication de manuels scolaires, l’expertise et une philosophie sociale.

Le Département de la culture: un style de vie cultivée

En raison du blocus que le Département de Sociologie de la Faculté de Philosophie de l’Université de São Paulo lui impose, Lévi-Strauss réoriente ses investissements vers des institutions extérieures à l’université45 45 . Lévi-Strauss déclare: “[…] je me sentais infiniment plus à l’aise dans le département de la culture de la municipalité. Autour de Mário de Andrade, grand poète et esprit profondément original, passionné de folklore et de traditions populaires, il y avait des jeunes gens de grande culture, des historiens, des savants, des essayistes, comme Ségio Milliet, Rubens B. de Moraes et surtout Paulo Duarte, car nous nous sommes liés d’une amitié fraternelle qui s’est poursuivie à New York et à Paris”. Lévi-Strauss, 1996, p. 10-11. . C’est au sein du Département de la Culture de la municipalité de São Paulo qu’il envisage la possibilité de développer certains de ses projets, aux côtés de Dina Dreyfus46 46 . Sur les relations entre Lévi-Strauss, Dina Dreyfus et le ministère de la Culture, voir Cerqueira 2014; Raffaini 2001; Peixoto, 1998; Valentini, 2011. . En principe, le Département de la Culture pourrait être considéré comme une institution qui, parce qu’elle est municipale, occupe une position dominée par rapport à l’Institut d’Éducation. Cependant, malgré sa compétence municipale, le projet était ambitieux, comme le dit Dina Dreyfus dans l’un de ses rapports et comme le prévoyaient également ses créateurs47 47 . “Le Département de la Culture est la plus importante et la plus fructueuse des réalisations. Son but ultime est l’expansion culturelle […]. Son influence et son action s’accroissent chaque jour. Actuellement, la plupart des manifestations intellectuelles et artistiques de l’État de São Paulo sont sous sa dépendance; il dispose de moyens pratiques (son budget annuel est de 3 000 contos de réis) qui lui permettent de faire de grandes réalisations.” Dina Dreyfus, 1936, apud Entretien de Lévi-Strauss avec Carlos Sandroni, 2002 [1983], pp. 240-241. .

Selon Paulo Duarte, le politicien du groupe, le Département de la Culture était sa création, tandis que l’université était celle de Júlio de Mesquita Filho. L’idée était cependant de transformer le Département de la Culture en un “institut” d’état, l’“Institut pauliste de la culture”, et il fut même question de fonder, si les élections de 1937 avaient été gagnées par le gouverneur de São Paulo, un futur “Institut brésilien de la culture”48 48 . Les lettres entre Paulo Duarte et Mário de Andrade et entre Sérgio Milliet et Mário de Andrade sont révélatrices de ce projet. Voir Duarte 2022. . Le projet s’inspirait en partie des institutions et des politiques culturelles françaises dont Paulo Duarte avait pris connaissance lors de son premier exil à Paris en 193249 49 . Paulo Duarte avait rencontré Rivet en 1928, lorsqu’il était venu à São Paulo pour visiter le Musée Paulista. . En raison de son intérêt pour l’anthropologie criminelle et pour la fondation d’un institut de criminologie à São Paulo, il était entré en contact avec Paul Rivet, ce qui lui avait permis de connaître diverses institutions françaises, en particulier le Musée d’Ethnographie du Trocadéro50 50 . Paul Duarte a été exilé deux fois pendant les années 1930. Lors de la “révolution de 1932” et après le coup d’État de 1937. Voir Duarte, 1977, vol. 2; Hayashi, 2003. . L’appellation “Institut de culture”, utilisée par Paulo Duarte dans sa correspondance avec Mário de Andrade, est significative de son investissement dans des institutions plus autonomes, axées sur la recherche et la prestation de services, relativement indépendantes de l’université (Karady 2011KARADY, V. (2011), "Durkheim e os primórdios da etnologia universitária". Antropolítica: Revista Contemporânea de Antropologia, 1 (28).)51 51 . Sur l’importance des projets concernant le futur Musée de l’Homme, Voir Laurière, 2008; Delpuech, Laurière et Peltier-Caroff (orgs.), 2017; Blanckaert et Coppens, 2015. .

Certaines études soulignent la complémentarité entre le Département de la Culture et l’Institut de l’Éducation – une image que les agents eux-mêmes ont contribué à construire52 52 . Moraes, 1982, 2001; Duarte, 1977/1985; Cerqueira, 2014. . En fait, Fernando de Azevedo a participé à l’élaboration du projet du Département de la culture, mais dans les années qui ont suivi, les deux institutions sont devenues, à certains égards, rivales. L’apogée de ce conflit larvé se situe en 1937, lorsque les mêmes fonctions sont incorporées par les deux institutions. L’opposition entre la politique culturelle et la politique éducative, qui n’est pas très nuancée dans la littérature, a fait l’objet de nombreuses discussions à cette époque – ce qui nous permet d’attribuer une dimension sociologique à l’antipathie entre Mário de Andrade et Fernando de Azevedo, les directeurs des deux institutions53 53 . Je tiens à remercier Irene Cardoso pour les informations – à qui Fernando de Azevedo a révélé son antipathie envers Mário de Andrade – et Fabio Keinert pour la médiation de ce contact. . Mário de Andrade considérait que les “instituts culturels” de recherche et de diffusion culturelle étaient “indispensables”, et que l’éducation scolaire était relativement limitée par rapport au potentiel de l’éducation culturelle54 54 . La citation est longue, mais significative pour l’argument. Selon Mário de Andrade, “il faut organiser les services, forcer la vitalité des musées et la création d’instituts culturels qui agissent à travers des processus éducatifs extra-pédagogiques qui deviennent de plus en plus les plus aptes à enseigner. Ce qui est peut-être le plus admirable dans la pédagogie contemporaine, c’est son caractère pour ainsi dire anti-pédagogique […]. C’est ainsi que seront les musées, les instituts culturels que je voudrais voir se répandre plus fréquemment parmi nous. Oui, nous avons un besoin énorme d’écoles primaires et de centres d’alphabétisation. Mais l’organisation intellectuelle d’un peuple ne se fait pas chronologiquement, d’abord ceci, puis cela. C’est d’autant plus vrai pour un peuple aussi jeune et contemporain que le nôtre, avec des avions, des terrains de jeux, des radios, des bibliothèques publiques, des journaux, et donc pas de Moyen-Âge. Ne nous laissons donc pas piéger par les sophismes sentimentaux de l’enseignement primaire. Il est indispensable, mais tout aussi indispensables sont les instituts culturels où la recherche va de pair avec la vulgarisation, avec la vulgarisation de l’intelligence […]. Il ne suffit pas d’apprendre à lire aux analphabètes […]. Si l’on ne diffuse pas d’autres organismes qui indiquent au peuple la valeur et la gloire de ce qui a été défendu, tout restera lettre morte, jouissance sentimentale et égoïste d’une élite”. Lettre de Mário de Andrade à Paulo Duarte. Duarte, 1977, pp. 231-232. . Cette perception sera reprise par le groupe de directeurs du Département de la culture, puisque, contrairement aux enseignants de l’Institut d’Éducation, leur relation avec l’école était très différente, plus “libre” des classifications scolaires, au prix d’une plus grande dépendance à l’égard des élites dirigeantes.

Profil du groupe: une internationale culturaliste

Si l’on ne considère que les principaux créateurs et directeurs du département pendant la période de fondation, les noms suivants sont identifiés: Mário de Andrade, Sergio Milliet, Rubens Borba de Moraes, Nicanor Miranda et Paulo Duarte lui-même. Ils formaient un groupe plus ou moins homogène, ancré dans des liens familiaux, un activisme politique commum et un style de vie cultivé. Mário de Andrade, Sergio Milliet, Paulo Duarte, Rubens Borba de Morais et Nicanor Miranda sont des personnages, comme le dit Moraes, issus de familles oligarchiques ou “parents pauvres” de ces familles. Certains, comme Moraes, vivaient de leurs revenus et n’avaient pas besoin de travailler; d’autres, comme Paulo Duarte et Sergio Milliet, étaient “tombés en disgrâce” et vivaient avec moins de ressources. Cependant, ils avaient des parents et/ou des amis proches parmi les groupes dirigeants de São Paulo, un capital fondamental à cette époque55 55 . L’entretien avec Rubens Borba de Moraes, ainsi que les Mémoires de Paulo Duarte, sont très instructifs à cet égard. Voir Moraes, 1982; Duarte, 1977, vol. 2. . Paulo Duarte a rencontré Nicanor Miranda à la faculté de droit, qu’il qualifie de “jeune homme cultivé” et qui, dans les années 1920, fréquentait, avec d’autres intellectuels, son appartement de l’Avenida São João, lieu de rencontre de ce groupe d’intellectuels. Milliet partage l’appartement avec Paulo Duarte pendant un certain temps, puis devient son beau-frère.

Tous, à l’exception de Mário de Andrade, ont été marqués par des trajectoires internationales. Millet avait été envoyé à Genève pour étudier à l’âge de 14 ans après avoir fréquenté le Collège de São Bento; à la suite de bouleversements familiaux, selon lui, “je suis passé d’une vie de jeune homme riche à la misère d’un exilé sans argent de poche” (Milliet, Diário Crítico, vol. 2, p. 7). Outre les liens familiaux, il partage avec Paulo Duarte le goût du journalisme, de la littérature et du militantisme au sein du Parti démocratique56 56 . Sur Milliet, voir Paollilo, 2019; Hyaishi, 2010. . Borba de Moraes et Milliet se sont rencontrés au Collège de São Bento et sont partis ensemble étudier en Suisse, une tradition des familles aisées, selon une interview donnée par Borba de Morais. Après presque dix ans passés à l’étranger, ils ont ramené de Genève des “nouveautés” littéraires qu’ils ont partagées avec les intellectuels brésiliens. Borba de Moraes a cherché Mário de Andrade, car ils étaient tous deux originaires de la ville d’Araraquara, et leurs affinités intellectuelles se constituent à travers leurs préférences littéraires et artistiques, comme Aragon, Cocteau, Breton, Cendrars, etc. Borba de Moraes est devenu bibliophile et dirige la section des bibliothèques du Département de la Culture57 57 . “Lorsque Sérgio Milliet et moi-même sommes arrivés de Suisse en 1919, après y avoir étudié pendant de nombreuses années, nous étions très bien informés sur le mouvement moderniste. Nous étions des modernistes à Genève. Nous avions lu Cocteau, Aragon; notre revue était la Nouvelle Revue Française; nous connaissions Apollinaire. Lorsque nous sommes arrivés au Brésil, nous sommes partis à la recherche des groupes d’intellectuels. J’ai cherché Mário en raison de liens familiaux; on m’a dit qu’il était originaire d’Araraquara, comme moi, etc.” Moraes, 1982. .

Paulo Duarte a été engagé par le journal Oesp en 1919 et, quelques années plus tard, il a fondé avec ses collègues le Diário de Notícias, un organe du Parti démocratique (PD), une dissidence de l’ancien Parti Républicain de São Paulo (PRP). L’activisme politique du groupe lui permet d’initier certains de ses membres aux arcanes des politiques publiques, notamment dans le domaine culturel. Mário de Andrade avait été invité par Paulo Duarte pour diriger le Département de la culture. On ne sait pas comment ils se sont rencontrés, mais possiblement dans les cercles intellectuels modernistes des années 1920, impliqués dans des projets politiques et culturels à São Paulo. Mário de Andrade était également un habitué de l’appartement de l’avenue São João et a collaboré plus tard avec les deux journaux – Diário de Notícias et Oesp. En 1934, bien qu’autodidacte, il s’était déjà montré très au fait de la “culture brésilienne”. Ses contacts avec les membres des groupes contre le président Getúlio Vargas lui ont valu d’être nommé à des projets culturels dans la municipalité de São Paulo et, plus tard, au sein du gouvernement fédéral (Miceli, 2009MICELI, Sérgio. (2009), "Mário de Andrade: a invenção do moderno intelectual brasileiro". In: BOTELHO, André & SCHWARCZ, Lilia Moritz (orgs.). Um enigma chamado Brasil: 29 intérpretes e um país. São Paulo, Companhia das Letras, pp. 160-174.). La trajectoire de Mário de Andrade présente un trait caractéristique de ce groupe: il est le seul à ne pas avoir de diplôme universitaire, signe d’une insoumission aux classifications scolaires et d’une recherche de légitimation par des principes extérieurs à l’école. Les liens entre eux se sont tissés par d’autres voies, indépendantes de leur scolarité. Outre les relations avec les familles oligarchiques et le capital culturel, qui les conduisent à des projets éditoriaux communs mais éphémères, comme la revue des modernistes Klaxon, ils partagent également des positions politiques “socialisantes”, le terme étant entendu comme l’élargissement des droits politiques et sociaux de la population.

Outre leur circulation internationale et leur profil politique, une autre caractéristique de ce groupe, par rapport au profil des professeurs, est la diversité des fonctions qu’ils ont assumées (critiques d’art, artistes, professeurs, journalistes, traducteurs, écrivains, politiciens etc.). La formation en Suisse, qui a marqué la carrière de Milliet et Borba de Moraes, leur a permis de connaître l’avant-garde littéraire et esthétique ainsi que les idéaux et les institutions de la coopération intellectuelle internationale58 58 . Sur la Société des Nations et les investissements de la Fondation Rockefeller, voir Tournes, 2011; Mazon, 1988; Renoliet, 1981. . En tant que chef de la section de la Documentation historique et sociale du Département de la culture, Milliet a cherché à réaliser des enquêtes sur divers aspects de la vie sociale dans la municipalité de São Paulo, notamment sur le niveau de vie, le logement, les transports, l’assistance sociale, etc.59 59 . Plusieurs des enquêtes ont été publiées dans la Revista do Arquivo Municipal. Voir Duarte, 2022, p. 152. . Ces enquêtes faisaient partie d’un mouvement international d’études basées sur la recherche appliquée, en Europe et aux États-Unis, pour le développement des politiques publiques. Dans le cas du Département de la culture, elles avaient pour fonction, d’une part, d’orienter les politiques publiques municipales et, d’autre part, de donner une visibilité internationale aux études sociales brésiliennes. Ainsi, le Département de la Culture a investi en recherches collectives afin d’en présenter les résultats lors de congrès internationaux.

Tableau 2
: Département de la Culture (1934-1938)

Dans le cadre de l’Exposition Universelle de 1937, de nombreuses conférences ont été organisées dans le domaine de la culture et des sciences sociales. Comme représentante du Département de la Culture, Milliet a présenté une communication au Congrès International de la Population organisé par l’Institut international de coopération intellectuelle60 60 . Publication des travaux de Sergio Milliet au Congrès de la Population de la Commission internationale de recensement. Revista do Arquivo Municipal, vol. 39, 1937, pp. 281-289. Voir aussi S. Milliet, “Le statistique démographique de la ville de Sao Paulo et la représentation graphique par courbe de niveau”, Congrès International de la Population, 1938, pp. 241-242. . Nicanor Miranda, également membre du Département de la Culture, a présenté deux communications au Premier Congrès International de Folklore61 61 . Deux communications ont été présentées au nom de la Société d’ethnographie et de folklore. La première, coordonnée par Mário de Andrade et Dina Dreyfus, portait sur les interdictions alimentaires, les danses et la médecine populaire. Le second travail, réalisé par Nicanor Miranda, portait sur les loisirs des travailleurs dans la ville de São Paulo. Nicanor Miranda a présenté les deux travaux au congrès. Voir Revista do Arquivo Municipal, numéro 42, 1937, pp. 95-96. Les communications ont été publiées dans Travaux du 1er Congrès International de Folklore, Arrault et Cie., Tours, 1938. . Ce n’est pas un hasard si ce congrès a été organisé par le tout nouveau Musée des Arts et Traditions Populaires, dirigé par Georges Henri Rivière, et sous la présidence de Paul Rivet62 62 . Dans les années 1920 et 1930, les conférences internationales sur le folklore et/ou les arts populaires se multiplient. C’est dans ce contexte que Mário de Andrade est invité à présenter une communication au Congrès des arts populaires de 1928, organisé à Prague par l’Institut international de coopération intellectuelle. Voir Laurière, 2008; Toni, 2021; Ducci, 2015. . En 1937, Lévi-Strauss et Dina Dreyfus étaient très proches de Rivet, qui leur écrivait au sujet des expéditions au Brésil et des expositions à Paris. Ainsi, la présentation de travaux par le Département de la Culture a été fait dans l’intérêt des deux parties: elle accrédite l’institution et les intellectuels brésiliens, mais présente aussi à Rivet et aux collègues français les activités menées au Brésil par l’orientation des professeurs français.

Se démarquant des éducateurs brésiliens de l’Institut d’Éducation, les écrivains du Département de la Culture ne se consacrent pas à l’enseignement à l’université ou à l’édition de manuels scolaires. Parmi ceux qui suivent les cours de Dina Dreyfus, la majorité est constituée de fonctionnaires de la mairie de São Paulo, mais il y a aussi des étudiants de Lévi-Strauss à la Faculté de Philosophie63 63 . Une étude du profil de 63 personnes qui ont suivi le cours de Dina Dreyfus montre quelques propriétés collectives: hommes et femmes dans des proportions presque égales, originaires majoritairement de la province, et nés dans les années 1910. Concernant la fonction, le pourcentage de fonctionnaires est plus élevé, ce qui fait la grande différence avec le profil des élèves de l’Institut de l’Education. Voir Valentini, 2011. . Ne pouvant vivre du marché de l’édition, comme les pédagogues, ils étaient beaucoup plus dépendants des élites dirigeantes et de leurs projets politiques.

* * *

Fondée en 1936, la Société d’ethnographie et de folklore était associée au Département de la Culture et peut être considérée comme l’un des plus importants projets de Lévi-Strauss et de Dina Dreyfus64 64 . Les rapports entre Lévi-Strauss et Dina Dreyfus avec le Département de la Culture ont déjà été largement documentés et analysés. Voir Raffaini, 2001; Valentini, 2011; Cerqueira, 2014; Peixoto 1998; Pontes, 1998. Il est seulement intéressant ici de différencier ces investissements de ceux réalisés par son collègue Arbousse-Bastide à l’Institut d’Éducation. . La Société avait pour fonction d’institutionnaliser des activités déjà développées, mais nécessitait des statuts et des attributions que Lévi-Strauss résume dans une lettre à Mário de Andrade: réunions périodiques, conférences, communications, organisation de la recherche, exposition des résultats de la recherche. À ces activités s’ajoutent des services de suivi et de communication du travail collectif, principalement axés sur la collecte, le classement et la circulation de l’information. Dina Dreyfus, à la même époque, précise également les domaines couverts par la Société: “[…] guider, promouvoir et diffuser les études ethnographiques, anthropologiques et folkloriques”65 65 . Cf. Archives IEB – Instituto de Estudos Avançados/USP. Fonds Mário de Andrade, 1937. . Dans ces lignes directrices, la délimitation des savoirs de cette Société se distingue de celle de la Société de sociologie, fondée en 1935. Celle-ci recouvrait des domaines beaucoup plus vastes et abstraits, tels que la “philosophie sociale”, la “sociologie formelle”, la “sociologie appliquée” et l’”anthropologie culturelle” (AIE, 1936, p. 207). A cette première différence, s’en ajoutent d’autres: théorie et macrosociologie vs. méthode et recherche de terrain. La différence entre les deux sociétés, minimisée par certaines études, comme cela a déjà été souligné (Rubino, 1995), n’est pas due à une quelconque autonomie entre les deux “sciences” à l’époque, mais aux dispositions des groupes qui les ont fondées et aux différentes positions qu’ils occupaient dans le champ du pouvoir. La Société de sociologie était dirigée par Fernando de Azevedo et Arbousse-Bastide, tandis que la Société d’Ethnographie était entre les mains de Mário de Andrade et Dina Dreyfus. C’est pourquoi Sérgio Milliet, professeur de sociologie, a pris un poste au Département de la Culture, tandis que Herbert Baldus, ethnographe, s’est rapproché de l’Institut de l’Éducation. Dans le cas de ce dernier, Fernando de Azevedo l’avait chargé d’organiser le mMusée d’Ethnographie de l’Institut d’Éducation et de réaliser des expéditions avec le soutien de l’Institut, tout en lui offrant un espace pour publier dans sa collection66 66 . Dans cette période, les impressions de Baldus sur Lévi-Strauss sont très mauvaises. Je souligne la lettre envoyée à Curt Nimuendajú de 11/10/1937 dans laquelle il critique son travail et même sa posture professionnelle. Cf. Welper et al. (orgs.), 2019, p. 71. .

Comme la Société d’Ethnographie, la Société de sociologie a envoyé une communication à la Conférence Internationale des Sciences Sociales, organisée dans le cadre de l’Exposition Universelle de 1937, avec le soutien de l’Institut International de Coopération Intellectuelle. L’article a été publié dans les actes de la conférence, possiblement par accord entre Azevedo, Arbousse-Bastide, Georges Dumas et Célestin Bouglé. L’article, signé par trois étudiants de l’Institut d’Éducation, Aquilles Archero, Alberto Conte et Eudoro Ramos, s’intitule “Sociologie brésilienne contemporaine”67 67 . Sur Achilles Arquero, voir Pinheiro et Miceli, 2008. Alberto Conte a posé sa candidature à l’Institut de l’Éducation, mais a perdu au profit de Noemy Rudolfer. En ce qui concerne Eudoro Ramos Costa, on sait qu’il était un journaliste. . Dans les classifications de la sociologie proposées par les auteurs – “sociologie des questions sociales”, “sociologie pure” et “sociologie appliquée” – il existe une hiérarchie, le pôle scientifique “pur” étant le plus valorisé et, dans cette rubrique, Fernando de Azevedo68 68 . Voir Actes du Congrès. Les Convergences des sciences sociales et l’esprit international. Bouglé, 1937, Centre d’études de politique étrangère. Juillet 1937. Voir aussi Rubino, 1995. . Célestin Bouglé, proche de Dumas, préside ce congrès et souligne dans son introduction l’importance du dialogue international pour “faire disparaître progressivement les marques nationales” des sciences sociales (Bouglé, 1937, p. 15).

Malgré la convergence entre ces congrès, axées sur l’“internationalisme” en raison de la croissance du “nationalisme”, il existe d’importantes différences entre les congrès. Dans le cas du congrès de sociologie, les communications portaient sur des bilans ou des critiques d’auteurs; dans le cas du congrès de folklore, les communications portaient sur des études empiriques sur des groupes sociaux spécifiques. Cette circulation liait la société scientifique, la recherche (théorique ou empirique) et la présentation des travaux à l’étranger – ce qui a permis, d’une part, de donner de la visibilité aux Brésiliens et, d’autre part, de répondre aux attentes envers des missions françaises.

Considérations finales

L’objectif était de montrer qu’il existe des différences importantes dans les trajectoires et les dispositions des enseignants qui ont participé aux missions françaises, en lien avec le contexte d’origine et les transformations de l’espace transnational. Par ailleurs, la sociabilité et les projets de ces enseignants sont nécessairement liés au contexte de destination ou à la configuration à laquelle ils participent. Considérées isolément, la théorie sociale ou la philosophie sociale (Arbousse-Bastide) et l’ethnologie et la recherche ethnographique (Lévi-Strauss) occupent des positions différentes dans l’espace disciplinaire: la science établie, la sociologie, tente de bloquer l’essor de la nouvelle science par l’exclusion ou l’annexion. Cependant, dans le cas de São Paulo, comme il n’y a pas un champ disciplinaire, les praticiens du nouveau savoir sont des intellectuels-écrivains qui occupent une position dominante, tandis que les praticiens du savoir “établi”, la sociologie, occupent une position dominée dans le champ du pouvoir. En ce sens, le “mépris” des professeurs français à l’égard de l’Institut d’Éducation est significatif, de même que la présence d’une femme dans le corps professoral de cette institution, alors que Dina Dreyfus n’a pas été engagée par la Faculté de philosophie.

Il faut considérer le rôle des médiateurs entre les milieux intellectuels de São Paulo et de la France: la liaison entre Paul Rivet et Lévi-Strauss inaugure une politique de diffusion de la “science française” différente de la diplomatie intellectuelle pratiquée par Georges Dumas et Arboussse-Bastide. Ce n’est pas un hasard si la correspondance entre Rivet et Dumas est pratiquement inexistante, alors qu’on aurait pu s’attendre à un dialogue fréquent en raison de leur circulation en Amérique latine. Dumas, en raison de ses liens avec le Ministère des Affaires Étrangères et de sa position de professeur à la Sorbonne, avait fondé une “diplomatie d’en haut”, tandis que Rivet préférait une politique médiatisée par le chercheur et, d’un point de vue institutionnel, caractérisée par une plus grande ouverture aux intellectuels autodidactes. En ce qui concerne les deux collègues du Département de Sociologie, les dispositions de Lévi-Strauss le portent à prendre de risques au-delà des conceptions établies, alors que les disposition d’Arbousse-Bastide sont plutôt liées à la préservation des pratiques universitaires. Dans les décennies suivantes, leurs carrières respectives en France ont consolidé ces différences: Lévi-Strauss a occupée un poste à l’École Pratique des Hautes Études et Arbousse-Bastide à l’Université de Rennes.

En ce qui concerne l’institutionnalisation de la formation à la recherche à la Faculté de philosophie, sciences et lettres, Florestan Fernandes et Antonio Candido, deux membres de la première génération formée à la Faculté de Philosophie devenus professeurs, sont arrivés à la conclusion qu’il serait nécessaire de reformuler le cours de sciences sociales69 69 . Voir Fernandes, 1958, [1959] 1977; Candido, 1954. . Dans les années 1950, ces auteurs ont publié quelques revues sur la sociologie et l’ethnologie à São Paulo pendant les années 1930. Antonio Candido met l’accent sur les relations harmonieuses entre les institutions de l’époque, tandis que Florestan Fernandes préfère souligner la “crise” de la sociologie à la Faculté de Philosophie, due au manque de ressources pour la recherche. Se référant au malaise provoqué parmi les collègues par la publication de Tristes tropiques (1955), Florestan Fernandes essaye de profiter du contexte pour souligner les analogies entre l’enseignement universitaire en France et au Brésil – la formation théorique est importante, mais les nouvelles générations, contrairement à l’ancienne génération des professeurs français, avaient besoin de se spécialiser.

Le Département de la Culture et l’Institut de l’Éducation ont tous deux subi des revers après le coup d’État du président Getúlio Vargas, ce qui montre qu’ils avaient beaucoup en commun vis-à-vis de cet autre projet national. L’énorme ambition des deux groupes de nationaliser l’expérience locale de São Paulo, dont ils prétendaient qu’elle était légitime dès lors qu’elle était soutenue par des collègues et des institutions étrangères, a probablement joué un rôle dans ce résultat. Le groupe du Département se disperse, ce qui correspond à un monde d’individus qui circulent plus “librement” par rapport aux institutions scolaires, mais qui sont plus facilement la proie d’interférences politiques; le groupe des enseignants de l’Institut est transféré à la Faculté de Philosophie et, malgré leur position subalterne, maintient sa croyance dans la valeur de l’école et forme les nouvelles générations.

Cette recherche a été réalisée avec le soutien de la Fapesp – Fundação de Amparo à Pesquisa do Estado de São Paulo – et du programme DEA de la Fondation Maison des Sciences de l’Homme. Je remercie Hélène Arbousse-Bastide pour la mise à disposition des archives familiales. Je remercie Rafael Andrade et Bruno Cuer pour leur dialogue et leur collaboration dans la préparation de cet article, ainsi que Nadège Mézié pour la révision.

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  • WELPER, Elena (org.). (2019). Chamado da selva: correspondência entre Curt Nimuendajú e Herbert Baldus. Rio de Janeiro, Camera Books.
  • 1
    . Cette recherche a été réalisée avec le soutien de la Fapesp – Fundação de Amparo à Pesquisa do Estado de São Paulo – et du programme DEA de la Fondation Maison des Sciences de l’Homme. Je remercie Hélène Arbousse-Bastide pour la mise à disposition des archives familiales. Je remercie Rafael Andrade et Bruno Cuer pour leur dialogue et leur collaboration dans la préparation de cet article, ainsi que Nadège Mézié pour la révision.
  • 2
    . Des études antérieures ont développé une histoire des sciences sociales et de l’Université de São Paulo. Voir Antunha, 1974ANTUNHA, Heladio César Gonçalves. (1974), Universidade de São Paulo: fundação e reforma. São Paulo, SP, MEC-Inep-CRPES (Centro Regional de Pesquisa Educacionais do Sudeste). Estudos e Documentos, vol. 10. jun. ; Schwartzman, 1979SCHWARTZMAN, Simon. (1979), Um espaço para a ciência: A formação da comunidade científica no Brasil. São Paulo, Companhia Editora Nacional.; Cardoso, 1982CARDOSO, Irene. (1982), A universidade da comunhão paulista. São Paulo, Cortez.; Miceli, 1989MICELI, Sérgio. (1989), História das Ciências Sociais no Brasil, vols. 1 e 2. São Paulo, Vértice/Revista dos Tribunais., 1995; Carlotto, 2014CARLOTTO, M. (2014), Universitas sempre reformada? A história da Universidade de São Paulo e o discurso da gestão à luz da estrutura social. São Paulo, tese de doutorado em sociologia. Faculdade de Filosofia, Letras e Ciências Humanas da Universidade de São Paulo.. Sur le rôle des missions françaises à la Faculté de Philosophie, Sciences et Lettres, voir Massi, 1988; Peixoto, 1989PEIXOTO, Fernanda Arêas. (1989), "Franceses e norte-americanos nas ciências sociais brasileiras". In: MICELI, Sergio (org.). História das ciências sociais no Brasil. São Paulo, Idesp/Vértice/Finep, vol. 1, pp. 410-459., 2001; Suppo, 2001SUPPO, Rogelio Hugo. (2001), La politique culturelle française au Brésil entre les années 1920-1950. Paris, tese de doutorado, Paris III.; Petitjean, 1996PETITJEAN, P. (dir.). (1996), A ciência nas relações Brasil-França (1850-1950). São Paulo, Edusp.; Lefevre, 1993LEFÈVRE, Jean-Paul. (avril-juin 1993), "Les missions universitaires françaises au Brésil dans les années 1930". Vingtième Siècle. Revue d'Histoire, 38: 24-33.; Loyer, 2015LOYER, E., (2015), Lévi-Strauss. Paris, Flammarion.; Merkel, 2022MERKEL, I. (2022), Terms of exchange. Brazilian intellectuals and the French Social Sciences. Chicago, University of Chicago Press.; Consolim, 2021CONSOLIM, M. (2021), "Circulação de intelectuais e recepção das novas ciências do homem francesas no Brasil, 1908-1932". Tempo Social, 33 (1): 17-51., 2023CONSOLIM, M. (2023), "L'enseignement des sciences sociales au Brésil: Français, Nord-Américains et Brésiliens (1933-1945)". Revue d'Histoire des Sciences Humaines, 42: 15-48..
  • 3
    . La bibliographie spécialisée mentionne cette controverse, mais brièvement et sans prétendre extraire de cet épisode une clé d’interprétation des positions intellectuelles et des transferts scientifiques de la période. Voir Cardoso, 1987CARDOSO, Irene. (1987), Entrevista com Roger Bastide: 18/08/1973. Revista Discurso, 16: 181-197.; Rubino, 1989RUBINO, Silvana. (1989), "Clubes de pesquisadores: A Sociedade de Etnologia e Folclore e a Sociedade de Sociologia". In: MICELI, Sergio (org.). História das Ciências Sociais no Brasil. São Paulo, Vértice.; Peixoto, 1998PEIXOTO, Fernanda Arêas. (1998). "Lévi-Strauss no Brasil: a formação do etnólogo". Mana, 4 (1): 79-107.; Suppo, 2001SUPPO, Rogelio Hugo. (2001), La politique culturelle française au Brésil entre les années 1920-1950. Paris, tese de doutorado, Paris III.; Loyer, 2015LOYER, E., (2015), Lévi-Strauss. Paris, Flammarion.; Silva, 2008SILVA, Dimitri Pinheiro. (2008), Da Política à Ciência Política; Da Ciência Política à Política: a trajetória acadêmica de Paula Beiguelman (1949-1969). Dissertação de mestrado, Faculdade de Filosofia, Letras e Ciências Humanas da Universidade de São Paulo, FFLCH/USP., Valentini, 2011VALENTINI, Luisa. (2011), Um laboratório de antropologia: o encontro entre Mário de Andrade, Dina Dreyfus e Claude Lévi-Strauss (1935-1938). São Paulo, dissertação de mestrado em Antropologia Social, Faculdade de Filosofia, Letras e Ciências Humanas da Universidade de São Paulo.; Rubino, 1989RUBINO, Silvana. (1989), "Clubes de pesquisadores: A Sociedade de Etnologia e Folclore e a Sociedade de Sociologia". In: MICELI, Sergio (org.). História das Ciências Sociais no Brasil. São Paulo, Vértice.; Cerqueira, 2014CERQUEIRA, Vera Lucia Cardim de. (2014), Ciências sociais na gestão Mário de Andrade: contribuições de Samuel Lowrie e Dina Lévi-Strauss. São Paulo, Annablume..
  • 4
    . Sur ce sujet, voir Pollak, 2018POLLAK, Michaël. (2018), "Paul F. Lazarsfeld: fundador de uma multinacional científica". Política & Sociedade, 17 (38): 94-134; Palmeira, 2017PALMEIRA, Miguel Soares. (2017), "Dos efeitos de um exílio: Moses Finley na Inglaterra". Revista de História, 176: 1-31.; Jeanpierre, 2004JEANPIERRE, Laurent. (2004), "Une opposition structurante pour l'anthropologie structurale: Lévi-Strauss contre Gurvitch, la guerre de deux exilés français aux États-Unis". Revue d'Histoire des Sciences Humaines, 11: 13-44., 2022; Kluger, 2018. Voir aussi Bourdieu, 2002BOURDIEU, Pierre. (2002), "As condições sociais da circulação internacional das ideias". Tradução: Fernanda Abreu. Enfoques, Rio de Janeiro, 1 (1): IV-XV., et Sapiro, 2016SAPIRO, Gisele. (2016), "Modelos de intervenção política dos intelectuais: o caso francês". Revista Pós Ciências Sociais. 9 (7)., 2019SAPIRO, Gisele. (2019), "A noção de campo de uma perspectiva transnacional: A teoria da diferenciação social sob o prisma da história global". Plural, Revista do Programa de PósGraduação em Sociologia da USP, São Paulo, 26 (1): 233-265..
  • 5
    . Voir Lévi-Strauss, [28/06/1941] 2015.
  • 6
    . Sur la critique de Lévi-Strauss du durkheimisme et de l’esprit philosophique, ainsi que de la politique de Georges Dumas et des élites de São Paulo, voir Lévi-Strauss, Tristes tropiques, 1955, pp. 51-52 et 96-97. Plus de quatre décennies après, Lévi-Strauss revient sur le sujet dans un entretien avec Didier Eribon: “Georges Dumas avait mis un jeune parent sociologue à l’université en première année. Quand ce fut mon tour, le second sociologue en quelque sorte, il essaya de me mettre dans une position subalterne. Cela ne m’a pas plu et, lorsque j’ai résisté, il a essayé de me renvoyer au nom de la tradition comtiste, dont il était spécialiste et que mon enseignement trahissait. Les dirigeants de l’université, qui étaient aussi les dirigeants du grand journal O Estado de S. Paulo, lui ont prêté une oreille attentive ». Voir Lévi-Strauss, in Didier Eribon, 1998ERIBON, Didier. (1998), De Près et de loin. Paris. Odile Jacob., p. 33. L’épisode revient aussi dans Claude Lévi-Strauss: saudades de São Paulo. São Paulo, Companhia das Letras, 2009. Jean Maugué, dans Les Dents agacees, reprend la version publiée par Lévi-Strauss selon laquelle Arbousse-Bastide était un parent de Dumas. Cette version a été reprise dans de nombreuses études, mais il n’y a en fait aucun lien de parenté entre Dumas et Arbousse-Bastide.
  • 7
    . En 1937, Arbousse-Bastide publie des éditoriaux anonymes au journal Oesp, alors que Lévi-Strauss publiera très peu dans ce journal.
  • 8
    . Dans le programme original publié par le décret de janvier 1934, les matières suivantes figuraient au programme: psychologie sociale, anthropologie sociale et sociologie politique. Voir Oesp, 25/01/1934. Ensuite, Arbousse-Bastide a inclus ces disciplines sous la rubrique “sociologie”. Les contenus du cours de sociologie sont les suivants: sociologie générale; sociologie mentale et inter-mentale; sociologies spéciales (science des mœurs, sociologie juridique, sociologie criminelle, sociologie économique); sociologies spéciales (domestique, politique, esthétique, religieuse, linguistique, normative et appliquée, ainsi que des notions d’ethnologie). Voir Anuário, [1934-1935] 2009. Ce programme a été approuvé par le décret 7069 du 06/04/1935.
  • 9
    . Voir Anuário da Faculdade de Filosofia, Ciências e Letras, [1934-1935] 2009, pp. 157-174.
  • 10
    . Je tiens à remercier le professeur Fernando Pinheiro Filho d’avoir mis cette documentation à ma disposition. Il s’agit d’un résumé de 130 pages des contenus enseignés pendant les deux semestres de la première année et le premier semestre de la deuxième année, daté de 1938.
  • 11
    . Dans le cas des rapports entre psychologie et sociologie, d’autres sources sont utilisées: le Nouveau Traité de Psychologie de Dumas, les textes sur la IV Semaine de Synthèse d’Henri Berr, les publications du Centre de Documentation Sociale de Bouglé, ainsi que les pratiquants de la psychologie des foules. Parmi les anglo-saxons, on trouve les classiques de la psychologie sociale anglo-saxonne: Baldwin, James, Ellwood et MacDougall. Parmi les Allemands, on trouve: Freud, Stein, Wundt, von Wiese et Simmel.
  • 12
    . “Enfin, nous avons ajouté des notions d’ethnologie la dernière année, afin de rappeler aux étudiants en sociologie que l’observation modeste et minutieuse de l’ethnographe doit constituer, avec la statistique judicieusement maniée, un instrument de valeur pour le sociologue […].” Voir Arbousse-Bastide, Anuário, [1934-1935] 2009, p. 163.
  • 13
    . Arbousse-Bastide, Oesp, 1935; idem, Revista do Arquivo Municipal, 1935. Voir également cette controverse dans Valentini, 2011VALENTINI, Luisa. (2011), Um laboratório de antropologia: o encontro entre Mário de Andrade, Dina Dreyfus e Claude Lévi-Strauss (1935-1938). São Paulo, dissertação de mestrado em Antropologia Social, Faculdade de Filosofia, Letras e Ciências Humanas da Universidade de São Paulo.; Cerqueira, 2014CERQUEIRA, Vera Lucia Cardim de. (2014), Ciências sociais na gestão Mário de Andrade: contribuições de Samuel Lowrie e Dina Lévi-Strauss. São Paulo, Annablume.; Consolim 2023CONSOLIM, M. (2023), "L'enseignement des sciences sociales au Brésil: Français, Nord-Américains et Brésiliens (1933-1945)". Revue d'Histoire des Sciences Humaines, 42: 15-48..
  • 14
    . Arbousse-Bastide a contacté les centres européens suivants: l’Institut international de coopération intellectuelle à Paris, le Centre de documentation sociale (CDS) de l’Escola Normal Superior, le Bureau international d’éducation (BIE) et le Bureau international du travail (BIT). Voir Archives de l’Institut d’Éducation, 1936 et 1937. Pour les lettres d’Arbousse-Bastide à Bouglé, voir les Archives Nationales Fonds de l’Ecole Normale Supérieure. Pour les lettres au Bureau international de l’éducation à Genève, voir les Archives de l’Unesco. Voir aussi les rapports d’Arbousse-Bastide aux autorités françaises du Ministère des Affaires étrangères.
  • 15
    . De nombreuses études spécialisées se sont penchées sur l’œuvre et la trajectoire de Lévi-Strauss. Il s’agit ici simplement de souligner les propriétés qui le différencient d’Arbousse-Bastide. Voir Grupioni, 1998GRUPIONI, Luís Donisete Benzi. (1998), Coleções e expedições vigiadas: Os etnólogos no Conselho de Fiscalização das Expedições Artísticas e Científicas no Brasil. São Paulo, Hucitec/ANPOCS.; Suppo, 2001SUPPO, Rogelio Hugo. (2001), La politique culturelle française au Brésil entre les années 1920-1950. Paris, tese de doutorado, Paris III.; Massi, 1989MASSI, Fernanda. (1989), "Franceses e norte-americanos nas Ciências Sociais brasileiras (1930-1960)". In: MICELI, Sergio (org.). História das Ciências Sociais no Brasil. São Paulo, Vértice.; Merkel, 2022MERKEL, I. (2022), Terms of exchange. Brazilian intellectuals and the French Social Sciences. Chicago, University of Chicago Press.; Loyer, 2015LOYER, E., (2015), Lévi-Strauss. Paris, Flammarion.; Eribon, 1998ERIBON, Didier. (1998), De Près et de loin. Paris. Odile Jacob.; Lévi-Strauss, 1996LÉVI-STRAUSS, Claude. (1996), Saudades de São Paulo. São Paulo, Companhia das Letras, Instituto Moreira Salles..
  • 16
    . Selon lui, le “fait social” ne serait qu’une dimension de la “culture” et, d’autre part, l’étude de la “culture matérielle” serait le moyen de traiter la culture “comme une chose”. Il souligne que Durkheim a également été soupçonné de “matérialisme” (par Tarde). En effet, Lévi-Strauss critique l’étude des “représentations” et propose de les traiter comme des “objets dépourvus de conscience”. Voir Lévi-Strauss, Anuário, [1934-1935] 2009.
  • 17
    . Le premier cours de Lévi-Strauss s’intitule “Formes élémentaires de la vie sociale”, dans lequel il aborde les institutions domestiques, économiques, politiques et religieuses des sociétés primitives. Le second cours s’intitule “Le problème de l’état de nature et de l’état de société du XVIIIe siècle à nos jours”, cours théorique dans lequel il enseigne Rousseau, Montaigne, Locke, Hobbes, Spinoza et l’école de Manchester, en précisant toutefois que son point de vue est l’apport des sciences positives “dans le passage de la nature à la société”. Voir Lévi-Strauss, Anuário, 1936. Sur la nature théorique de ses cours, voir Florestan Fernandes 1978FERNANDES, Florestan. (1978), A condição de sociólogo. São Paulo, Hucitec..
  • 18
    . Voir Lévi-Strauss, Oesp, 1935. Voir aussi Valentini, 2011VALENTINI, Luisa. (2011), Um laboratório de antropologia: o encontro entre Mário de Andrade, Dina Dreyfus e Claude Lévi-Strauss (1935-1938). São Paulo, dissertação de mestrado em Antropologia Social, Faculdade de Filosofia, Letras e Ciências Humanas da Universidade de São Paulo.. Sur le rôle de ces instituts, voir Karady, 2011KARADY, V. (2011), "Durkheim e os primórdios da etnologia universitária". Antropolítica: Revista Contemporânea de Antropologia, 1 (28)..
  • 19
    . “La France a toujours eu mauvaise presse ici. […] Lévi Strauss revient avec une ‘mission’ à l’Exposition de 37! Dans le parti, il y a un petit os à chacun. Cela aurait alors un très mauvais effet, car les Brésiliens se rendraient compte que l’Exposition est le choix du Front populaire, ce qui n’est pas fait pour les attirer.” Arbousse-Bastide, Lettre à ses parents, 1937. Sur la méfiance à l’égard des enseignants français, voir Cardoso, entretien avec Bastide 18/08/1973. Sur les suspicions à l’égard de Lévi-Strauss, cf. Loyer, 2015LOYER, E., (2015), Lévi-Strauss. Paris, Flammarion.; Almeida, 1984ALMEIDA, Antonio Marcos. (1984), “Entrevista com Paul Arbousse-Bastide”. In: Língua e Literatura, Numero Comemorativo, ano X: 7-34.; Grupioni, 1998GRUPIONI, Luís Donisete Benzi. (1998), Coleções e expedições vigiadas: Os etnólogos no Conselho de Fiscalização das Expedições Artísticas e Científicas no Brasil. São Paulo, Hucitec/ANPOCS.. En 1937, Paul Rivet est exclu de l’Académie brésilienne des sciences, épisode que Dumas est appelé pour renverser la situation. cf. Rapports des Réunions de l’Académie Brésilienne de Sciences, Rio de Janeiro, 1937.
  • 20
    . La critique des professeurs français adressée à Arbousse-Bastide rappelle une prise de position critique de Bourdieu: “[…] tout enseignement supérieur qui ressemble au collège est considéré comme insupportable et de mauvais goût. On croit faire preuve de finesse en se plaçant au-dessus de tout ce qui peut ressembler à l’enseignement en classe. Chacun fait face à cette petite vanité et croit alors avoir déjà dépassé son époque de pédagogie”. Bourdieu, 1992, p. 226.
  • 21
    . Lévi-Strauss n’a pas obtenu la bourse de la Fondation Rockefeller pour les États-Unis. Voir Loyer 2015LOYER, E., (2015), Lévi-Strauss. Paris, Flammarion.. Sur la mobilité des professeurs et étudiants français, voir aussi Charle, 1994, 2004.
  • 22
    . Mauss reste dans la stricte lignée de la sociologie durkheimienne. Suivant Hirsch, pour Mauss “[…] ‘Il faut des sociologues et des ethnologues: les uns éclairent, les autres renseignent’ – et d’une subordination des enquêtes ethnographiques à une sociologie dite “la” science sociale […]. Il se distingue en cela de Paul Rivet, préoccupé pour sa part de faire de l’ethnologie (présentée comme un nouveau nom remplaçant l’anthropologie) […]”. Cf. Hirsch, 2017, p. 358.
  • 23
    . Sur les investissements de la Fondation Rockefeller en France, voir Mazon, 1988MAZON, Brigitte. (1988), Aux origines de l'École des hautes études en sciences sociales: Le rôle du mécénat américain (1920-1960). Paris, Éditions du Cerf.; Tournès, 2007TOURNÈS, Ludovic. (2007), "La fondation Rockefeller et la naissance de l'universalisme philanthropique américain". Critique Internationale, 35: 173-197., 2008TOURNÈS, Ludovic. (2008), "La fondation Rockefeller et la construction d'une politique des sciences sociales en France (1918-1940)". Annales. Histoire, Sciences Sociales, 63e année: 1371-1402., 2011, 2012TOURNÈS, Ludovic. (2012), "La philanthropie américaine, la Société des Nations et la coproduction d'un ordre international (1919-1946)". Relations Internationales, 151: 25-36.; Charle et al., 2004.
  • 24
    . Sur les rapports entre ethnographie et avant-garde esthétique, voir Vincent Debaene, 2010DEBAENE, Vincent. (2010), L'adieu au voyage: l'ethnologie française entre science et littérature. Paris, Gallimard. (Bibliothè que des Sciences Humaines).; voir aussi Loyer, 2015LOYER, E., (2015), Lévi-Strauss. Paris, Flammarion..
  • 25
    . Voir les archives du Musée National d’Histoire Naturelle. Fonds Paul Rivet. Sur la correspondance avec Bouglé, voir les Archives Nationales, Fonds de l’École Normale Supérieure. Pour la correspondance avec Dumas, voir les archives du Ministère des Affaires Étrangères. Pour la correspondance avec Mauss, voir les Archives du Collège de France, fonds Marcel Mauss.
  • 26
    . Les travaux de Laurent Jeanpierre sur l’exil de Lévi-Strauss aux États-Unis ont été les premiers à souligner l’importance du capital social accumulé par Lévi-Strauss pour sa carrière et, plus encore, à étudier cette question en opposant son style de vie intellectuel à celui de Georges Gurvitch. Au Brésil, cependant, Lévi-Strauss incarne le “chercheur” plutôt que l’“ambassadeur”. Néanmoins, dans les deux contextes, il entretient des relations tendues avec les “théoriciens” ou pratiquants d’une “philosophie sociale”. Voir Jeanpierre, 2004, 2022. Cf. aussi Charle, 1994.
  • 27
    . Selon Aron: “[…] on regrettera, cela va de soi, de ne pas rencontrer chez nous d’Instituts de sociologie comme plusieurs pays en connaissent. Aux Etats-Unis, en particulier, on peut mesurer les services qu’ils rendent: rassemblent les résultats des recherches spéciales, préparant des traités pour la formation des maîtres, mettant sur pied de grandes enquêtes collectives”. Aron, 1937, p. 40.
  • 28
    . “Nos législateurs seraient donc certainement honorés d’avoir des professeurs de sociologie à leurs côtés. Nous savons le rôle clé que jouent les professeurs de sociologie dans la vie pratique américaine. Nous savons que notre science a été appelée à prendre part aux débats du forum en France aussi.” Roger Bastide, 1936BASTIDE, Roger. (1936), "L'enseignement de sociologie en France". Revue Internationale de Sociologie, pp. 373-402., p. 396.
  • 29
    . Voir le dossier de retraite de Paul Arbousse-Bastide, Archives Nationales.
  • 30
    . “J’aimerais beaucoup vous entretenir de ces cours de pédagogie par correspondance que j’aimerais organiser pour les instituts français avec la collaboration de l’Institut J. J. Rousseau.” Voir Arbousse-Bastide, Archives BIE, 1932. En 1936, il déclare: “Je n’ai pas non plus oublié les projets de relations documentaires que je desirais organiser à São Paulo avec le BIE en particulier […]”. Arbousse-Bastide demande un plan de classement de la documentation pédagogique et déclare vouloir adhérer au Bureau. Voir Arbousse-Bastide, Archives du BIE, 1936.
  • 31
    . Il est important de souligner que Lévi-Strauss ne gardait pas un souvenir impérissable du Brésil et ne signalait un éventuel retour que s’il n’avait pas d’autre option. Ses contacts avec Fernando de Azevedo n’ont eu lieu qu’en 1942, alors que ce dernier était directeur de la Faculté de Philosophie, et sont restés dans les limites de leurs stricts intérêts. D’ailleurs, l’invitation à revenir n’est jamais venue. Dans ces lettres, il se montrait conscient des tensions lors de son séjour au Brésil et du prestige de sa nouvelle position: “Comme mes collègues de São Paulo semblent me jeter des regards d’envie, je suppose que ma présence à New York a dû redorer mon blason là-bas”. Voir Lévi-Strauss, 2015LÉVI-STRAUSS, Claude. (2015), "Chers tous deux": Lettres à ses parents (1931-1942). Paris, Seuil., p. 522.
  • 32
    . Sur les universités de São Paulo dans le contexte de l’ère Vargas, voir Miceli, 1989MICELI, Sérgio. (1989), História das Ciências Sociais no Brasil, vols. 1 e 2. São Paulo, Vértice/Revista dos Tribunais., 1995. Voir aussi Schwartzman, 1979SCHWARTZMAN, Simon. (1979), Um espaço para a ciência: A formação da comunidade científica no Brasil. São Paulo, Companhia Editora Nacional.; Antunha, 1974ANTUNHA, Heladio César Gonçalves. (1974), Universidade de São Paulo: fundação e reforma. São Paulo, SP, MEC-Inep-CRPES (Centro Regional de Pesquisa Educacionais do Sudeste). Estudos e Documentos, vol. 10. jun., 1975ANTUNHA, Heladio César Gonçalves. (1975), "As origens da Faculdade de Educação da USP: a introdução dos estudos pedagógicos de nível superior no estado de São Paulo". Revista da Faculdade de Educação, 1. São Paulo, SP..
  • 33
    . La correspondance d’Arbousse-Bastide à sa famille et celle de Fernando de Azevedo à Venâncio Filho sont révélatrices à cet égard. Voir Papiers Arbousse-Bastide; Penna, 1987PENNA, Maria L. (1987), Fernando de Azevedo: educação e transformação. São Paulo, Perspectiva..
  • 34
    . Les intellectuels nationalistes, catholiques et autres critiques de la Faculté de Philosophie, Sciences et Lettres font d’attaques violents à ceux manuels, comme c’est le cas du compte rendu d’Alexandre Correa dans la revue catholique A Ordem. Le manuel de sociologie de Fernando de Azevedo, par exemple, a été considéré comme du durkheimisme dépassé et dogmatique, étant donné les critiques de Déploige. Voir Correa, 1935.
  • 35
    . Pendant la période où il a occupé cette chaire, il a également été rémunéré pour cette fonction, comme l’indique sa correspondance à ses parents. Arbousse-Bastide doit quitter son fauteuil à la fin de l’année 1937, à la suite du décret présidentiel interdisant le cumul des postes dans la fonction publique. Sur la section de l’enseignement secondaire, voir Evangelista, 1997EVANGELISTA, Olinda. (1997), A formação do professor em nível universitário: O Instituto de Educação da Universidade de São Paulo (1934-1938). São Paulo, tese de doutorado em História e Filosofia da Educação, Pontifícia Universidade Católica de São Paulo.; Bontempi, 2011BONTEMPI JR., Bruno. (2011). "Do Instituto de Educação à Faculdade de Filosofia da Universidade de São Paulo". Cadernos de Pesquisa, 41 (142): 188-207..
  • 36
    . Pour cette section, ont été consultés les ouvrages et les documents suivants: Andrade, 2023ANDRADE, Rafael de. (2023), Uma ciência de serviços: Formação da Ciência Psicológica Paulista (1945-1957), Dir. Marcia Consolim. Guarulhos, monografia em Ciências Sociais, Universidade Federal de São Paulo.; Oriani, 2022ORIANI, A. P. (2022), "Higiene para as escolas primárias: A produção escrita de Antonio Ferreira de Almeida Júnior (1922-1939)". Educação e Pesquisa, 48.; Angelini, 2002ANGELINI, Arrigo L. (2002), "Centenário do nascimento da acadêmica Noemy da Silveira Rudolfer (08/08/1902 - 16/12/1980)". Boletim Academia Paulista de Psicologia, ano XXII, n. 4/02. Publicação trimestral. São Paulo, out./dez.; Azevedo, 1936AZEVEDO, Fernando. (1936), A educação e seus problemas, tomo I. São Paulo, Melhoramentos., 1961AZEVEDO, Fernando. (1961), Figuras de meu convívio. São Paulo, Melhoramentos.; Costa, 2007COSTA, Hebe C. Boa-Viagem A. (jun. 2007), "Resgatando a memória dos pioneiros em psicologia: Roldão Lopes de Barros. Acad. Paul. Psicol., São Paulo, 27 (1): 17-22., 2011COSTA, Hebe C. Boa-Viagem A. (2011), "Resgatando a memória dos pioneiros: Vida e obra de Milton Camargo da Silva Rodrigues - Acad. Paul. Psicol., São Paulo, 80 (1): 8-11, jun.; Nascimento, 2012NASCIMENTO, Alessandra Santos. (2012), Fernando de Azevedo: Dilemas na institucionalização da sociologia no Brasil. São Paulo, Cultura Acadêmica.; Bontempi, 2011BONTEMPI JR., Bruno. (2011). "Do Instituto de Educação à Faculdade de Filosofia da Universidade de São Paulo". Cadernos de Pesquisa, 41 (142): 188-207.; Vidal et al., 2019, 2020; Pinheiro et Miceli, 2008.
  • 37
    . Dans deux cas, cependant, d’autres facteurs d’instabilité apparaissent. Almeida Júnior a reçu un héritage à la mort de sa mère à l’âge de 21 ans, et Fernando de Azevedo, issu d’une famille riche en déclin, a semblé retrouver sa position initiale après avoir épousé la fille unique d’un médecin militaire et actionnaire de Banco União, qui est décédé peu de temps après. Cf. Almeida Jr., 1966; Azevedo, 1971AZEVEDO, Fernando. (1971), História da minha vida. São Paulo, Edusp..
  • 38
    . Voir la lettre d’Arbousse-Bastide au Bureau International de l’Éducation, 1937; Lettre d’Arbousse-Bastide à Bouglé, 1937BOUGLÉ, C. (1937), "Introduction". In: Les Convergences des Sciences Sociales et l'Esprit Internationale. Travaux de la conférence internationale des sciences sociales. Centre d'Etudes de Politique Etrangère. Paris, Paul Hartmann.; Archives de l’Institut d’Éducation (AIE), 1937. Lettre de Bouglé à Fernando de Azevedo, IEB, 1936. Dans les papiers personnels de la famille, on trouve trace des contacts d’Arbousse-Bastide avec des organisations de coopération intellectuelle. Dans un rapport au Ministère des Affaires Étrangères, il indique que “São Paulo souhaitait bénéficier de la documentation de ces organisations et leur fournir à son tour une documentation sur les problèmes économiques, sociaux et politiques du Brésil”. Les centres contactés par le professeur sont les suivants: Centre d’études et de documentation de l’École normale supérieure (Célestin Bouglé); Centre d’études de politique étrangère (Demery); Centre de recherches économiques et sociales (Charles Rist); Centre de recherches sociales de l’Université de Paris (Vaucher). Voir “Efforts de liaison entre certains organismes de documentation internationale à São Paulo”. Documents de la famille Arbousse-Bastide.
  • 39
    . Entre 1936 et 1938, 113 étudiants se sont inscrits à l’Institut d’Éducation pour obtenir le diplôme de professeur primaire ou secondaire. Les informations concernent l’âge, le sexe, le lieu de naissance et l’origine institutionnelle à l’USP. Les étudiants ont une moyenne d’âge de 23 ans, viennent de la campagne, sont majoritairement des femmes (13 % en 1936 et 66 % en 1938) et viennent de la Faculté de Philosophie (cours de philosophie, géographie, histoire, sciences sociales et politiques et langues étrangères). Après la deuxième année de fonctionnement de la Faculté de Philosophie, le profil des étudiants de l’Institut d’Éducation est devenu similaire à celui de la Faculté parce que les enseignants ont été autorisés à fréquenter l’université sur la base d’un commissionnement. Voir Evangelista, pp. 165-168. Voir aussi Limongi, 1989LIMONGI, Fernando. (1989), "Mentores e clientelas da Universidade de São Paulo". In: MICELI, Sergio (org.). (1989), História das Ciências Sociais no Brasil: 1. São Paulo, Vértice, pp. 111-187.; Miceli, 1989MICELI, Sérgio. (1989), História das Ciências Sociais no Brasil, vols. 1 e 2. São Paulo, Vértice/Revista dos Tribunais..
  • 40
    . Formando o homem (1944), préfacé par Azevedo, avec une traduction d’Antonio Candido. Voir Lettre d’Arbousse-Bastide remerciant Fernando de Azevedo: “Nous sommes tout à fait d’accord sur certains points essentiels, comme la fonction de culture générale et désintéressée que doit remplir, sinon exclusivement, du moins principalement, l’enseignement secondaire, et l’opportunité exceptionnelle de ce type d’enseignement, destiné aux adolescents”. Azevedo, 1944, p. XVIII.
  • 41
    . “Bien qu’il soit né sous l’inspiration de l’Institut international de Paris, qui nous a été apporté par l’intermédiaire de l’illustre professeur Paul Arbousse-Bastide, le ‘Centre’ ne remplira la mission pour laquelle il est appelé que s’il est lancé sur la base d’un service éminemment local, c’est-à-dire en tant qu’organe de coordination, lui-même, de toutes les données, informations et initiatives qui intéressent les études de nos propres problèmes d’éducation, publique et privée, à l’intérieur de l’État […]”. Archivos do Instituto de Educação, 4, 1937, p. 239.
  • 42
    . En janvier 1937, Nimuendajú déclare à Baldus: “L’Institut d’Éducation de l’Université de São Paulo m’a acheté une collection de Canela. Et non seulement il l’a achetée, mais il l’a payée! Fernando de Azevedo était sur mon dos à cause du matériel pédagogique – des jouets indiens entre autres – et, comme je ne pouvais pas les séparer du reste de la collection, il a immédiatement acheté tout le bric-à-brac, 391 pièces, pour 8 contos”. Lettre de Nimuendajú à Baldus Belém do Pará, 13 janvier 1937. Ce à quoi Baldus répond: “En tout cas, l’acquisition de votre collection par l’Institut d’Education a donné à Fernando l’envie d’y organiser une sorte de Musée Ethnographique, sous le nom de “Centre de Documentation Sociale et Ethnographique”, qu’il a l’intention de me confier. De plus, stimulé par votre lettre, il souhaite que je voyage afin de rassembler des collections pour ce musée”. Baldus, 5 février 1937. Voir la liste des 391 pièces dans la revue Archivos, 4, 1937, pp. 125-126.
  • 43
    . “Le Centre de documentation ethnographique et sociale de l’Institut de l’Éducation a déjà conclu un accord avec d’autres ethnologues afin qu’ils entreprennent, au service des musées respectifs, des enquêtes systématiques dans les régions susmentionnées, dans le but de recueillir le plus de matériel authentique et significatif possible. M. Herbert Baldus, par exemple, dont on connaît déjà plusieurs travaux sur la sociologie générale et surtout la glottologie des Zamuka et des Kashishá, s’est chargé de la mission concernant les Indiens Coroados ou Kaingang, avec lesquels le musée en cours d’organisation connaîtra un développement considérable.” Voir Archivos do Instituto de Educação, 1937, 4, p. 126.
  • 44
    . Il s’agit d’encourager une “société des esprits” pour un “désarmement moral”, fondé sur l’acceptation d’une “doctrine morale universelle” et l’utilisation de “méthodes scientifiques” pour comprendre la réalité contemporaine. Archivos do Instituto de Educação, vol. 3, 1937, pp. 13-15 et 238-242. Voir aussi Dumont, 2008DUMONT, Juliette. (2008), L'institut international de coopération intellectuelle et le Brésil (1924-1946). Paris, Ihel/Credal.; Renoliet, 1981RENOLIET, J.-J. (1981), L'Unesco oubliée: La Société des Nations et la coopération intellectuelle (1919-1946). Paris, Éditions de la Sorbonne..
  • 45
    . Lévi-Strauss déclare: “[…] je me sentais infiniment plus à l’aise dans le département de la culture de la municipalité. Autour de Mário de Andrade, grand poète et esprit profondément original, passionné de folklore et de traditions populaires, il y avait des jeunes gens de grande culture, des historiens, des savants, des essayistes, comme Ségio Milliet, Rubens B. de Moraes et surtout Paulo Duarte, car nous nous sommes liés d’une amitié fraternelle qui s’est poursuivie à New York et à Paris”. Lévi-Strauss, 1996, p. 10-11.
  • 46
    . Sur les relations entre Lévi-Strauss, Dina Dreyfus et le ministère de la Culture, voir Cerqueira 2014CERQUEIRA, Vera Lucia Cardim de. (2014), Ciências sociais na gestão Mário de Andrade: contribuições de Samuel Lowrie e Dina Lévi-Strauss. São Paulo, Annablume.; Raffaini 2001RAFFAINI, Patricia Tavares. (2001), Esculpindo a cultura na forma Brasil: o Departamento de Cultura de São Paulo (1935-1938). São Paulo, Humanitas FFLCH/USP, História Social USP.; Peixoto, 1998PEIXOTO, Fernanda Arêas. (1998). "Lévi-Strauss no Brasil: a formação do etnólogo". Mana, 4 (1): 79-107.; Valentini, 2011VALENTINI, Luisa. (2011), Um laboratório de antropologia: o encontro entre Mário de Andrade, Dina Dreyfus e Claude Lévi-Strauss (1935-1938). São Paulo, dissertação de mestrado em Antropologia Social, Faculdade de Filosofia, Letras e Ciências Humanas da Universidade de São Paulo..
  • 47
    . “Le Département de la Culture est la plus importante et la plus fructueuse des réalisations. Son but ultime est l’expansion culturelle […]. Son influence et son action s’accroissent chaque jour. Actuellement, la plupart des manifestations intellectuelles et artistiques de l’État de São Paulo sont sous sa dépendance; il dispose de moyens pratiques (son budget annuel est de 3 000 contos de réis) qui lui permettent de faire de grandes réalisations.” Dina Dreyfus, 1936, apud Entretien de Lévi-Strauss avec Carlos Sandroni, 2002SANDRONI, C. (2002). "Mário, Oneyda, Dina e Claude". Revista do Patrimônio, 30: 234-46. [1983], pp. 240-241.
  • 48
    . Les lettres entre Paulo Duarte et Mário de Andrade et entre Sérgio Milliet et Mário de Andrade sont révélatrices de ce projet. Voir Duarte 2022.
  • 49
    . Paulo Duarte avait rencontré Rivet en 1928, lorsqu’il était venu à São Paulo pour visiter le Musée Paulista.
  • 50
    . Paul Duarte a été exilé deux fois pendant les années 1930. Lors de la “révolution de 1932” et après le coup d’État de 1937. Voir Duarte, 1977DUARTE, Paulo Alfeu Junqueira de Monteiro. (1977), Paulo Duarte II (depoimento, 1977). Rio de Janeiro, CPDOC, 2010. 178p., vol. 2; Hayashi, 2003.
  • 51
    . Sur l’importance des projets concernant le futur Musée de l’Homme, Voir Laurière, 2008LAURIÈRE, Christine. (2008), Paul Rivet: Le savant et le politique. [S.l.], Publications Scientifiques du Muséum.; Delpuech, Laurière et Peltier-Caroff (orgs.), 2017; Blanckaert et Coppens, 2015.
  • 52
    . Moraes, 1982MORAES, Rubens Borba de. (1982), Entrevista realizada por Marco Aurelio Gomes em 15/08/1982. Rua 7, pp. 96-109., 2001MORAES, Rubens Borba de. (2001), KANTOR, I. et al. A Escola Livre de Sociologia e Política. São Paulo, Ed. Sociologia e Política.; Duarte, 1977DUARTE, Paulo Alfeu Junqueira de Monteiro. (1977), Paulo Duarte II (depoimento, 1977). Rio de Janeiro, CPDOC, 2010. 178p./1985; Cerqueira, 2014CERQUEIRA, Vera Lucia Cardim de. (2014), Ciências sociais na gestão Mário de Andrade: contribuições de Samuel Lowrie e Dina Lévi-Strauss. São Paulo, Annablume..
  • 53
    . Je tiens à remercier Irene Cardoso pour les informations – à qui Fernando de Azevedo a révélé son antipathie envers Mário de Andrade – et Fabio Keinert pour la médiation de ce contact.
  • 54
    . La citation est longue, mais significative pour l’argument. Selon Mário de Andrade, “il faut organiser les services, forcer la vitalité des musées et la création d’instituts culturels qui agissent à travers des processus éducatifs extra-pédagogiques qui deviennent de plus en plus les plus aptes à enseigner. Ce qui est peut-être le plus admirable dans la pédagogie contemporaine, c’est son caractère pour ainsi dire anti-pédagogique […]. C’est ainsi que seront les musées, les instituts culturels que je voudrais voir se répandre plus fréquemment parmi nous. Oui, nous avons un besoin énorme d’écoles primaires et de centres d’alphabétisation. Mais l’organisation intellectuelle d’un peuple ne se fait pas chronologiquement, d’abord ceci, puis cela. C’est d’autant plus vrai pour un peuple aussi jeune et contemporain que le nôtre, avec des avions, des terrains de jeux, des radios, des bibliothèques publiques, des journaux, et donc pas de Moyen-Âge. Ne nous laissons donc pas piéger par les sophismes sentimentaux de l’enseignement primaire. Il est indispensable, mais tout aussi indispensables sont les instituts culturels où la recherche va de pair avec la vulgarisation, avec la vulgarisation de l’intelligence […]. Il ne suffit pas d’apprendre à lire aux analphabètes […]. Si l’on ne diffuse pas d’autres organismes qui indiquent au peuple la valeur et la gloire de ce qui a été défendu, tout restera lettre morte, jouissance sentimentale et égoïste d’une élite”. Lettre de Mário de Andrade à Paulo Duarte. Duarte, 1977, pp. 231-232.
  • 55
    . L’entretien avec Rubens Borba de Moraes, ainsi que les Mémoires de Paulo Duarte, sont très instructifs à cet égard. Voir Moraes, 1982; Duarte, 1977DUARTE, Paulo Alfeu Junqueira de Monteiro. (1977), Paulo Duarte II (depoimento, 1977). Rio de Janeiro, CPDOC, 2010. 178p., vol. 2.
  • 56
    . Sur Milliet, voir Paollilo, 2019PAOLLILO, Lucas. (2019), Sérgio Milliet, sociólogo: entre observações e transições. Araraquara, dissertação de mestrado em Ciências Sociais, Universidade Estadual Paulista.; Hyaishi, 2010HYAISHI, Marli Guimarães. (2010), Paulo Duarte: um Quixote brasileiro. São Paulo, Hucitec..
  • 57
    . “Lorsque Sérgio Milliet et moi-même sommes arrivés de Suisse en 1919, après y avoir étudié pendant de nombreuses années, nous étions très bien informés sur le mouvement moderniste. Nous étions des modernistes à Genève. Nous avions lu Cocteau, Aragon; notre revue était la Nouvelle Revue Française; nous connaissions Apollinaire. Lorsque nous sommes arrivés au Brésil, nous sommes partis à la recherche des groupes d’intellectuels. J’ai cherché Mário en raison de liens familiaux; on m’a dit qu’il était originaire d’Araraquara, comme moi, etc.” Moraes, 1982MORAES, Rubens Borba de. (1982), Entrevista realizada por Marco Aurelio Gomes em 15/08/1982. Rua 7, pp. 96-109..
  • 58
    . Sur la Société des Nations et les investissements de la Fondation Rockefeller, voir Tournes, 2011TOURNES, Ludovic. (2011), Sciences de l'homme et politique Les fondations philanthropiques américaines en France au XXe siècle. Paris, Classiques Garnie.; Mazon, 1988MAZON, Brigitte. (1988), Aux origines de l'École des hautes études en sciences sociales: Le rôle du mécénat américain (1920-1960). Paris, Éditions du Cerf.; Renoliet, 1981RENOLIET, J.-J. (1981), L'Unesco oubliée: La Société des Nations et la coopération intellectuelle (1919-1946). Paris, Éditions de la Sorbonne..
  • 59
    . Plusieurs des enquêtes ont été publiées dans la Revista do Arquivo Municipal. Voir Duarte, 2022DUARTE, Paulo Alfeu Junqueira de Monteiro. ([1971] 2022), Mário de Andrade por ele mesmo. São Paulo, Todavia., p. 152.
  • 60
    . Publication des travaux de Sergio Milliet au Congrès de la Population de la Commission internationale de recensement. Revista do Arquivo Municipal, vol. 39, 1937, pp. 281-289. Voir aussi S. Milliet, “Le statistique démographique de la ville de Sao Paulo et la représentation graphique par courbe de niveau”, Congrès International de la Population, 1938, pp. 241-242.
  • 61
    . Deux communications ont été présentées au nom de la Société d’ethnographie et de folklore. La première, coordonnée par Mário de Andrade et Dina Dreyfus, portait sur les interdictions alimentaires, les danses et la médecine populaire. Le second travail, réalisé par Nicanor Miranda, portait sur les loisirs des travailleurs dans la ville de São Paulo. Nicanor Miranda a présenté les deux travaux au congrès. Voir Revista do Arquivo Municipal, numéro 42, 1937, pp. 95-96. Les communications ont été publiées dans Travaux du 1er Congrès International de Folklore, Arrault et Cie., Tours, 1938.
  • 62
    . Dans les années 1920 et 1930, les conférences internationales sur le folklore et/ou les arts populaires se multiplient. C’est dans ce contexte que Mário de Andrade est invité à présenter une communication au Congrès des arts populaires de 1928, organisé à Prague par l’Institut international de coopération intellectuelle. Voir Laurière, 2008LAURIÈRE, Christine. (2008), Paul Rivet: Le savant et le politique. [S.l.], Publications Scientifiques du Muséum.; Toni, 2021TONI, Flávia. (2021), “Fonografia e projeto nacional: o Brasil no Congresso de Arte Popular de Praga (1928)”. In: TONY, Flávia. & PAIXÃO, Fernando. (orgs.). Estudos brasileiros em três tempos. 1822 – 1922 – 2022. São Paulo, Fino Traço. pp. 223-251.; Ducci, 2015DUCCI, Annamaria. (maio 2015), "Le musée d'art populaire contre le folklore. L'Institut International de Coopération Intellectuelle à l'époque du Congrès de Prague". Revue Germanique Internationale, 21: 133-48..
  • 63
    . Une étude du profil de 63 personnes qui ont suivi le cours de Dina Dreyfus montre quelques propriétés collectives: hommes et femmes dans des proportions presque égales, originaires majoritairement de la province, et nés dans les années 1910. Concernant la fonction, le pourcentage de fonctionnaires est plus élevé, ce qui fait la grande différence avec le profil des élèves de l’Institut de l’Education. Voir Valentini, 2011VALENTINI, Luisa. (2011), Um laboratório de antropologia: o encontro entre Mário de Andrade, Dina Dreyfus e Claude Lévi-Strauss (1935-1938). São Paulo, dissertação de mestrado em Antropologia Social, Faculdade de Filosofia, Letras e Ciências Humanas da Universidade de São Paulo..
  • 64
    . Les rapports entre Lévi-Strauss et Dina Dreyfus avec le Département de la Culture ont déjà été largement documentés et analysés. Voir Raffaini, 2001RAFFAINI, Patricia Tavares. (2001), Esculpindo a cultura na forma Brasil: o Departamento de Cultura de São Paulo (1935-1938). São Paulo, Humanitas FFLCH/USP, História Social USP.; Valentini, 2011VALENTINI, Luisa. (2011), Um laboratório de antropologia: o encontro entre Mário de Andrade, Dina Dreyfus e Claude Lévi-Strauss (1935-1938). São Paulo, dissertação de mestrado em Antropologia Social, Faculdade de Filosofia, Letras e Ciências Humanas da Universidade de São Paulo.; Cerqueira, 2014CERQUEIRA, Vera Lucia Cardim de. (2014), Ciências sociais na gestão Mário de Andrade: contribuições de Samuel Lowrie e Dina Lévi-Strauss. São Paulo, Annablume.; Peixoto 1998PEIXOTO, Fernanda Arêas. (1998). "Lévi-Strauss no Brasil: a formação do etnólogo". Mana, 4 (1): 79-107.; Pontes, 1998PONTES, Heloisa. (1998), Destinos mistos: os críticos do Grupo Clima em São Paulo (1940-68). São Paulo, Companhia das Letras.. Il est seulement intéressant ici de différencier ces investissements de ceux réalisés par son collègue Arbousse-Bastide à l’Institut d’Éducation.
  • 65
    . Cf. Archives IEB – Instituto de Estudos Avançados/USP. Fonds Mário de Andrade, 1937.
  • 66
    . Dans cette période, les impressions de Baldus sur Lévi-Strauss sont très mauvaises. Je souligne la lettre envoyée à Curt Nimuendajú de 11/10/1937 dans laquelle il critique son travail et même sa posture professionnelle. Cf. Welper et al. (orgs.), 2019, p. 71.
  • 67
    . Sur Achilles Arquero, voir Pinheiro et Miceli, 2008. Alberto Conte a posé sa candidature à l’Institut de l’Éducation, mais a perdu au profit de Noemy Rudolfer. En ce qui concerne Eudoro Ramos Costa, on sait qu’il était un journaliste.
  • 68
    . Voir Actes du Congrès. Les Convergences des sciences sociales et l’esprit international. Bouglé, 1937BOUGLÉ, C. (1937), "Introduction". In: Les Convergences des Sciences Sociales et l'Esprit Internationale. Travaux de la conférence internationale des sciences sociales. Centre d'Etudes de Politique Etrangère. Paris, Paul Hartmann., Centre d’études de politique étrangère. Juillet 1937. Voir aussi Rubino, 1995.
  • 69
    . Voir Fernandes, 1958, [1959] 1977; Candido, 1954.

Publication Dates

  • Publication in this collection
    22 July 2024
  • Date of issue
    Jan-Apr 2024

History

  • Received
    03 Apr 2024
  • Accepted
    08 Apr 2024
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